Il en impose.
Le synclinal de la forêt de Saoû fait d’elle un petit joyau au cœur de la Drôme. « Des synclinaux, il y en a partout, mais celui-ci, en forme de bateau, se détache et s’aperçoit depuis toute la vallée », décrit Olivier Chambon, chargé de projet pour la protection, la gestion et l’accueil du public en forêt de Saoû.
Une place forte de la biodiversité
Si apparent, si singulier, ce synclinal perché attire de nombreux experts et géologues. Surtout, il fait vivre une multitude d’espèces… à préserver. Les 1 589 mètres de dénivelé qu’offre la plus grande balade depuis le bas de la forêt jusqu’aux Trois Becs permettent, grâce à ces différences d’altitude, à nombre d’espèces de trouver leur logis, leur température adéquate ou l’ensoleillement propice à leur épanouissement.
« Un tiers de la flore drômoise se retrouve en forêt de Saoû, alors qu’elle s’étend sur 2 400 hectares et ne représente que 0,4 % du département. »
La flore, un thermomètre du changement climatique
À cet endroit, on se situe à la confluence des climats méditerranéen, océanique et continental. Ainsi, au cœur de cette forêt, les paysages sont très différents. Les chênes au nord et les hêtres au sud, par exemple. Les milieux ouverts et fermés, secs et humides, abritent une multitude d’espèces néanmoins touchées par le changement climatique.
Olivier Chambon, aux côtés du responsable des écogardes, Nicolas Perron, constate des prémices du dérèglement climatique sur les sapins ou sur les hêtres. « Les hêtres ne débourrent pas, rougissent et finissent par mourir. Certains sont malades car ils ont trop chaud ou sont sous stress hydrique, ou les deux. Été comme hiver. »
En fait, c’est naturellement que les arbres sont attaqués, mais leur faiblesse causée par le manque d’eau amenuise leur capacité à se défendre. Lorsque des parasites les attaquent, ils sont donc encore plus fragilisés et, trois ou quatre ans après, commence leur dépérissement.
« Certains sapins, en bas de site, sont desséchés, alors on a procédé à leur abattage sanitaire. Sinon, on mise sur des végétaux plus adaptés au réchauffement climatique. » Mais attention, prévient l’écogarde : « Il ne s’agit pas de planter des cactus, mais de nouvelles espèces pour qu’elles vivent à long terme. »
Une faune « très mouvante »
La faune, elle, est par définition plus mobile. « Elle migre de façon autonome et peut même revenir en arrière », apprend Olivier Chambon. « L’écologie, c’est très compliqué. Avant, la faune et la flore évoluaient dans un climat constant, aujourd’hui, c’est très mouvant. »
Celles qui disparaissent peuvent être remplacées par d’autres qui s’adaptent. Une population se casse la figure, une autre va la remplacer. Mais le réchauffement climatique est beaucoup plus rapide que le temps d’adaptation des espèces et le spectre de tolérance diffère de l’une à l’autre. »
Le platane de 80 ans qu’on voit là pourrait être remplacé par un frêne », illustre Nicolas Perron. « Mais ce n’est pas à notre échelle de vie d’être humain. Réfléchir à court terme n’a pas de sens. Oui, on peut arrêter de polluer la planète en limitant les émissions de gaz à effet de serre et en favorisant la diversification, mais les solutions, comme pour revenir en arrière, on ne les a pas. »