Deux millions d’euros de chiffre d’affaires en mars 2020, 4,2 millions en 2021, 3 millions en 2022 et finalement 2,4 millions en 2023.
À la lecture de ces données, la première conclusion qui nous vient à l’esprit est la suivante : si la pandémie de Covid a converti de très nombreux Haut-Savoyards au ski de fond , on observe, depuis, un fléchissement de l’activité. Qui se constate d’ailleurs dans la plupart des indicateurs fournis par Haute-Savoie Nordic (HSN) , association qui fédère 25 foyers dans le département et promeut la discipline. Pour expliquer ce phénomène, qui – signalons-le tout de suite – n’est pas irréversible, plusieurs éclairages s’imposent.
1. Le rôle prépondérant de la météo
« La première chose qui justifie cette baisse du chiffre d’affaires, et notamment celui de l’année dernière, c’est l’enneigement qui a été plutôt… capricieux », commence par poser Charlotte Allier, de HSN. En termes de jours d’ouverture, cela s’est traduit par une baisse de 41 % par rapport à l’hiver d’avant. « L’intérêt des gens était là, mais ils n’ont tout simplement pas pu skier », rappelle cette dernière.
Et même lorsque les domaines étaient ouverts, ils ne l’étaient souvent que partiellement, ce qui a dégradé “l’expérience usager”. « Clairement, l’ambiance était moins sympathique sur les pistes. Du coup, ça ne donnait pas forcément envie de revenir le lendemain ou la semaine suivante », indique Michel Petit, responsable du domaine d’Agy.
2. Des chiffres à relativiser
Si la baisse du chiffre d’affaires de Haute-Savoie Nordic est certes continue depuis 2021, elle reste toutefois à relativiser.
« Les 2,4 millions d’euros que l’on fait cette année restent des excellents chiffres dans l’absolu, insiste Matthieu Desprat, le directeur de HSN. Pour rappel, lors de notre dernière saison dite “normale”, en 2020, nous n’avions fait “que” 2 millions. Et c’était déjà un record ! Tout ce qu’il y a eu entre les deux était hors cadre pour différentes raisons (Covid, fermeture des remontées mécaniques…) »
Autre preuve selon lui : le nombre de titres achetés en prévente (NDLR : avant que la saison ne débute), qui était, à l’automne 2022, en hausse de 30 % par rapport en 2021. « Cela signifie bien que les gens avaient envie, qu’ils étaient prêts, même si au final ils n’ont pas skié », signale-t-il.
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1 397 jours d’ouverture
Lors de l’hiver 2022-2023, et à cause du manque d’enneigement en Haute-Savoie, les 24 domaines ont proposé 1 397 jours d’ouverture, soit 600 de moins qu’en 2021-2022.
164 200 forfaits
164 200 forfaits, tous types confondus (jour, semaine, saison et scolaire), ont été vendus cette année, soit une baisse de 34 % par rapport à l’année dernière.
2,41 millions d’euros
Le chiffre d’affaires de la filière a été de 2,41 millions d’euros en 2023, soit un recul de 17 % par rapport à 2022.
3. Le fondeur a la montagne dans la peau
Une des raisons qui fait que les spécialistes du fond ne sont pas inquiets pour leur discipline réside également dans le portrait-robot du fondeur. « Contrairement au skieur alpin, qui, s’il n’y a pas de neige, va se diriger vers d’autres loisirs, plus urbains, le fondeur, lui, sera en montagne quoi qu’il arrive », estime Matthieu Desprat.
Il y fera de la randonnée, du trail ou du vélo, « mais il sera dehors quand même. » Et s’il neige, même un peu, il fera du ski de fond. « C’est dans son ADN. C’est un amoureux de l’outdoor qui s’adapte aux conditions », résume Michel Petit.
Pour les deux hommes, leur public n’est pas évanescent. Il est là et bien là, malgré des courbes de fréquentation fluctuantes. « Ça peut s’arrêter, repartir, s’arrêter, repartir, mais l’engouement ne varie pas. »
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4. Des motifs d’espoir
À quoi ressemblera l’hiver de cette année ? « Aujourd’hui, c’est impossible à prédire, confesse Matthieu Desprat. Personne n’a la moindre idée de l’enneigement qu’on va avoir. Y compris les prévisionnistes. » Au final, donc, « on peut très bien ne rien avoir comme en avoir énormément », lâche le directeur. Auquel cas la fréquentation sera au rendez-vous. D’autant plus que les tarifs du fond, même s’ils ont légèrement augmenté depuis un an (+7 % sur les titres en moyenne), demeurent plus compétitifs que ceux de l’alpin.
« Une saison de nordique, c’est le prix de deux jours à Chamonix ! On est sur une autre planète », se marre Michel Petit. Qui y voit un dernier motif d’espoir. « Si les gens aiment notre sport, c’est aussi pour cette raison-là, et elle n’est pas près de changer. »
Article issu du Dauphiné Libéré