Le central des pistes aux Deux-Alpes : la face cachée des secours

Les stations ont fait le plein durant les vacances de fin d’année. Aux Deux-Alpes, jusqu’à 17 000 skieurs/jour ont sillonné le domaine. Malgré tout le travail de prévention et sécurisation du service des pistes, cette période de forte affluence a enregistré son lot d’accidents.

« C’est ici que tous les appels arrivent et transitent »

En la matière, les pisteurs-secouristes sont les plus médiatisés. Pourtant, au sein de la chaîne des secours, tout commence au central : « C’est ici que tous les appels arrivent et transitent », explique Laurent Soullier, directeur adjoint du service des pistes.

Une ligne dédiée (04 76 79 75 02), inscrite notamment sur le plan des pistes, permet d’alerter quand une personne est blessée. « L’appel peut venir de l’entourage. Une personne qui est témoin peut solliciter un personnel des remontées qui contacte alors le central », poursuit-il. « Ce sont aussi les moniteurs et là, on peut presque parler de partenariat. »

Dans le bureau, la radio branchée en permanence alterne silence et échanges, tandis que deux régulatrices, au quotidien, réceptionnent les appels et diffusent les informations (une remontée en panne…). « Pisteurs 3200 pour le central », lance Viviane Roffat à la radio. Une fois le contact établi, elle reprend : « Jandri 4, balise 13, une femme avec des douleurs aux côtes. » Un pisteur confirme aller au contact.

« On fait de la recherche d’indices »

« Régulièrement, on fait de la recherche d’indices pour savoir précisément où se situe la personne », témoigne Viviane, pour les aider à repérer les balises en rive droite, disques numérotés qui portent le nom et la couleur de la piste. « Parfois c’est folklorique. » Il leur arrive même de demander l’envoi d’une photo ou vidéo.

« Nous avons aussi beaucoup d’étrangers qui composent le 112. » L’appel bascule sur le CTA (Centre de traitement de l’alerte) Codis (Centre opérationnel départemental d’incendie et de secours) qui communique ensuite les informations au central.

Pour les accidents plus graves, une fois le bilan transmis par les pisteurs-secouristes, le central contacte le Samu (le 15). Le médecin régulateur engage la médicalisation et Dragon 38, l’hélicoptère de la sécurité civile est déclenché. « Par an, en moyenne, nous avons 60 secours médicalisés », précise Laurent Soullier.

Laurent Soullier, directeur adjoint du service des pistes des Deux-Alpes avec Viviane Roffat et Valentine Caillot, deux des quatre régulatrices du “central”. Photo Le DL/Estelle Zanardi
Laurent Soullier, directeur adjoint du service des pistes des Deux-Alpes avec Viviane Roffat et Valentine Caillot, deux des quatre régulatrices du “central”. Photo Le DL/Estelle Zanardi

« Il faut rester factuel et rassurer »

Évidemment, dans ces situations, le stress prédomine comme pour ce jeune dont l’ami était inconscient. « Est-ce qu’il respire ?» «Oui. » Dans tous les cas, « il faut rester factuel et rassurer. » User de diplomatie aussi quand on leur dit : « Mes chaussures me serrent, il faut me redescendre ! » Dans ces cas-là, « on essaie de raisonner, d’expliquer que si on envoie des pisteurs, ils ne seront plus disponibles pour une vraie blessure », développe Viviane.

Elle leur rappelle aussi que les secours ont un coût (selon le secteur de 160 à 1080 euros) qui leur sera facturé. Veiller à l’encaissement et à l’équilibre de la régie est une charge qui incombe au service. Il n’est pas rare que les salariées contactent les assurances, surtout étrangères, pour obtenir une garantie de paiement. « Cette semaine, j’ai échangé avec une assurance jordanienne », dit Viviane qui accompagne aussi les victimes dans les méandres administratifs. « L’assurance à 3,50 euros facilite toute la chaîne de remboursement. »

« Les fins de journée sont assez chargées avec la fatigue »

Au fil de la journée, sur son ordinateur, chaque secours fait l’objet d’une fiche remplie par les pisteurs-secouristes (nom de la victime, contact, système d’évacuation…). Elles croisent également la famille ou les amis qui viennent récupérer les skis, surfs des accidentés… déposés par les pisteurs dans un local annexe.

Il est 16 heures et les téléphones sonnent plus souvent. « Les fins de journée sont assez chargées avec la fatigue.  » Une nouvelle alerte tombe : « À tous les secteurs, enfant perdu, John 7 ans, en combi orange, perdu au jardin ESF. » Pas d’inquié tude, « on les retrouve toujours », assure-t-elle. Les régulatrices n’hésitent pas à rester avec un petit égaré au central en attendant que ses parents arrivent, et ce bien après la fermeture du domaine.

D’ailleurs, ajoute Laurent Soullier  : « À 18 heures, on voit aussi des pisteurs qui accompagnent les derniers skieurs à la frontale. »

Rien ne compte plus que la sécurité.

« On met beaucoup d’énergie dans la prévention »

Quel skieur dévalant les pistes pense un seul instant au travail réalisé pour qu’il puisse se faire plaisir en toute sécurité ? Pourtant, « toute une chaîne est mobilisée au quotidien et chacun a son rôle », comme l’explique Laurent Soullier, directeur adjoint du service des pistes des Deux-Alpes.

Le service s’appuie sur 72 pisteurs-secouristes répartis sur cinq secteurs (comptant un voire deux postes de secours). « On a reçu énormément de CV de personnes du massif central et des Pyrénées, là ou l’enneigement devient plus aléatoire. La station, au regard de son altitude et de son exploitation jusqu’à 3600 mètres assure une pérennité dans ce métier passion. »

Avant d’évoquer l’accidentologie, Laurent Soullier rappelle « qu’il y a déjà toute la prévention sur laquelle on met toute notre énergie. C’est le point de départ ». Elle passe, entre autres, par le déclenchement des avalanches et le passage des pisteurs pour donner le feu vert de l’ouverture des pistes, les campagnes nationales (sur le port du casque…) affichées sur les pylônes et remontées… « Nous avons aussi une team info présente sur le domaine » pour conseiller les skieurs.

Le central qui réceptionne les alertes et assure l’organisation des secours est également l’un des maillons du service. Quatre personnes, dotées du PSE (premiers secours en équipe) 1 et 2, dont deux au quotidien assurent ces missions. Pour les dernières arrivées comme Valentine, « c’est un apprentissage avec une montée en puissance. Ce sont des postes de l’ombre, reconnaît Laurent Soullier mais qui apportent beaucoup ».

Les vacances de Noël sont une période particulière liée à la densité de skieurs : du 23 décembre 2023 au 7 janvier 2024, 262 secours ont été réalisés dont sept Samu (accidents graves) pour 183 185 passages sur les remontées. Un chiffre similaire à l’an dernier rapporté au nombre de pratiquants (du 17 décembre 2022 au 1er janvier 2023, 199 secours réalisés dont six Samu pour 159 582 passages).

L’analyse de l’accidentologie est un axe clé. « Nous avons des réunions hebdomadaires pour cibler les points critiques, essayer de partager les flux, éviter les croisements dangereux, améliorer la signalétique, casser les vitesses… Il ne faut pas imaginer que le domaine est immuable, on le fait évoluer. » Pour toujours plus de sécurité.

Article issu du Dauphiné Libéré

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