Pour parvenir seul et sans oxygène en haut du Pumori (7 138 m), il faut de l’audace et du courage. Il a aussi fallu à Lucien Boucansaud de la lucidité et de la persévérance. Samedi 28 octobre, le guide Chamoniard de 27 ans a réussi à atteindre le sommet de cette superbe montagne située à la frontière népalo-tibétaine après une première tentative infructueuse quelques jours plus tôt.
Objectif du voyage : progresser
Parti cet automne au Népal avec Guillaume Pierrel, l’un de ses fidèles compagnons de cordée, et l’himalayiste expérimenté David Goettler, le gamin du Lavancher n’avait pas d’objectif précis pour cette expédition, si ce n’est se frotter une seconde fois à la très haute altitude de l’Himalaya et mûrir en tant qu’alpiniste. « Nous avons eu une super phase d’acclimatation », reconnaît le Chamoniard qui, avec ses deux amis tout aussi affûtés que lui, a enchaîné en courant ou presque, des cols à 5 800 mètres d’altitude, avant de s’attaquer à la répétition d’une voie espagnole au Cho Polu (6 735 m). Une course technique à laquelle ils ont rajouté une variante.
Ascension « à l’improviste »
À dire vrai, lorsque ses deux camarades durent quitter plus tôt que prévu la vallée du Khumbu, Lucien était déjà comblé par son voyage et les rencontres qu’il avait pu faire dans cette partie de l’Himalaya. Parfaitement acclimaté, le jeune guide n’a toutefois pas pu résister à la tentation de mettre à profit les jours de voyage qui lui restaient pour tenter de son premier 7 000 mètres. « Mes yeux se sont portés sur le Pumori, un sommet qui fait face à l’Everest et dont la voie normale reste suffisamment accessible pour envisager de la grimper seul », explique-t-il.
« Le solo, j’aime ça, mais je m’y risque qu’une fois ou deux par an »
Frustré, celui qui a la sagesse du guide dans la peau rebrousse chemin. Après quelques jours à attendre les bonnes conditions anticycloniques, l’occasion se présente à nouveau. Cette fois tout est réuni pour que l’ascension soit couronnée de succès.
En seulement 8 h 20, il parvient au point le plus haut de sa jeune carrière des cimes. « Le solo, j’aime ça, mais je m’y risque qu’une fois ou deux par an. C’est à chaque fois un moment unique où je ressens des choses très fortes. Je suis maître de mes décisions, ce qui m’enlève du stress et me permet de savourer l’instant. Mais j’aime trop grimper avec les copains pour en faire une habitude », confie celui qui tout en ayant fait seul la trace, reste pour l’heure le premier alpiniste de la saison à atteindre le toit du Pumori.
Une performance solitaire qu’avaient déjà réalisé Marc Batard, 35 ans plus tôt, l’Américain Jeff Lowe en 1984 ou encore le Suisse Ueli Steck en 2007, mais surtout une étape, avant d’un jour peut-être, se frotter aux montagnes de plus de 8 000 mètres.
Article issu du Dauphiné Libéré