Si l’année 1964 marque l’avènement de la station des Habères, créée en même temps que sa voisine Hirmentaz, le ski tel qu’on le conçoit (des concours étaient déjà organisés dans les années 1930) a débuté un peu avant. « De 1962 à 1968, les gens enseignaient sans diplômes, côté des chalets. Les moniteurs se déplaçaient chez les gens. Le transfert vers la station s’est fait très progressivement jusqu’à la fin des années 1970 » confie Jean-Claude Condevaux, directeur de l’école de ski (créée en 1968) pendant plus de 25 ans.
« C’était un tire-fesses très dangereux, très raide. On avait horreur de le prendre »
Ce qui n’a pas empêché la station de se développer, à l’initiative du maire de l’époque, Francis Ducrot, avec un premier appareil en 1964, financé par des privés. Un second, le téléski des Granges (1966) permettra d’assurer la liaison avec Hirmentaz. « C’était un tire-fesses très dangereux, très raide. On avait horreur de le prendre » précise Marcel Rosay, chef d’exploitation de la station durant 30 ans. Il faudra attendre près de vingt ans pour qu’il soit remplacé par le télésiège des Crêtes (1983). En 1980, le premier télésiège est construit (La Frastaz) tandis que le dernier, le télésiège du Darandet, plus jeune appareil de la station, voit le jour en 1988 à la place du téléski éponyme.
Les classes de neige ont fait l’âge d’or de la station
Une décennie d’investissements qui correspond à l’âge d’or des Habères, exploitée en régie municipale. Très bien dotée en or blanc, la fierté des Dhabérents faisait le plein grâce aux classes de neige, venues de toute la France, et notamment de région parisienne, skier sur la vingtaine de kilomètres de pistes. « Certaines années, on avait plus de 40 groupes sur l’hiver. Ils privatisaient le TGV depuis Paris jusqu’à Annemasse avant de venir skier chez nous et dans d’autres stations du Chablais » assure Marcel Rosay.
Pour loger tout ce petit monde, la commune possédait une offre hôtelière bien supérieure à celle d’aujourd’hui, mais s’était également lancée dans la création de gîtes communaux. « C’était très novateur à l’époque » confie Bertrand Converset, maire-adjoint d’Habère-Poche, président des remontées mécaniques des Habères. En dehors de la clientèle juvénile, la station avait ses entrées auprès des familles thononaises mais aussi dans le bassin genevois. « On avait parfois 45 minutes de queue devant la Frastaz. Un autre temps ! »
Idéal pour apprendre à skier
Comme tous les sites de moyenne et basse altitude, les Habères, qui possède un domaine étagé de 940 à 1 580 mètres d’altitude, souffre aujourd’hui d’un déficit d’enneigement récurrent, qui met en péril son avenir (voir par ailleurs). Un constat illustré par la fréquentation annuelle, alors que le domaine relié (Hirmentaz-Les Habères) a attiré un peu plus de 108 000 skieurs l’hiver dernier, déjà tronqué par des fermetures successives. Et qui, à moyen et long terme, aura des incidences sur la pratique du ski. « Les sites comme les nôtres sont des stades d’apprentissage du ski pour les familles, qui, partent ensuite dans les plus grandes stations. Si ce travail de fourmi venait à disparaître, c’est toute l’économie du ski qui sera impactée. Les grandes stations n’auront plus cette clientèle à qui on a donné le goût du ski » insiste Jean-Claude Condevaux.
