Maintenir le logement des locaux, un défi de taille pour les stations

Plus 3 % en moyenne pour la Savoie, moins 22 % à Tignes. Selon le dernier recensement de l’ Insee , entre 2015 et 2021, la station de Tarentaise a perdu 500 habitants sur 2500 environ.

Des chiffres attendus

Pour le maire, cette tendance n’est pas une surprise. « Nous savions que la population baissait », confie Serge Revial. En cause : le faible nombre de logements et la surenchère immobilière. « Quand j’ai commencé mon premier mandat d’adjoint en 2014, le prix du m2   était de 3 800 euros », rappelle le maire. Dix ans ans plus tard, il a plus que doublé pour avoisiner les 10 000 euros.

10 000 € le mettre carré, impossible d’acheter pour les jeunes

« Les jeunes qui veulent s’installer ne peuvent trouver de superficie convenable. Un 60 m2 revient à 600 000 euros. » Pour eux, la Ville a investi 1,7 million d’euros, en plus du terrain lui appartenant au Lavachet où 31 appartements doivent être construits en accès à la propriété. « D’ici 2027, grâce au bail solidaire (BRS), des jeunes pourront acheter à un prix moyen de 3 500 € au m2 . Ils ne seront pas propriétaire du foncier mais uniquement des murs », précise le maire qui doit déjà départager 200 candidats. « Pour ne pas qu’il y ait de soupçons de favoritisme, un cahier des charges va être écrit. » L’autre atout du BRS, c’est qu’il fixe aussi un plafond et des règles de revente. « Ces biens vont se transmettre de propriétaire en propriétaire sans qu’il y ait de plus-value immobilière privée », se réjouit l’édile.

Tignes met la main à la poche

Un deuxième programme, cette fois financé par Tignes développement doit aussi voir le jour d’ici 2027. Il s’agit de rénover les anciens locaux d’un hôtel préemptés par la Ville. « Les loyers de la soixantaine de futures locations seront calculés pour que des permanents et des saisonniers puissent se loger à des tarifs accessibles. » L’opération doit être neutre pour la société d’économie mixte (Sem) de Tignes développement : « Pour qu’elle ne soit pas déficitaire mais ne fasse pas non plus de profits. »

Patrick Martin, maire de Val-d’Isère : « La nécessité, c’est de permettre aux locaux de louer »

Votre station est réputée comme la plus chère de France, avec un prix du m2 qui dépasse les 15 000 €. Comment enrayer cette surenchère immobilière ?

« En tant que maire, je suis là pour loger mes administrés pas faire leur patrimoine. Beaucoup me demandent de faire une accession à la propriété et, à la fin, de revendre leur logement avec une plus-value. Ce n’est plus possible. Le foncier devient extrêmement rare. Ce que nous faisons à travers notre SEM (Société d’économie mixte), c’est construire nos logements pour les habitants. Ils peuvent louer mais pas acheter. Ma priorité n’est pas l’accès à la propriété mais au logement. Ce n’est pas obligatoire d’acheter. Par contre avoir un toit pour élever sa famille et savoir ou dormir le soir, oui. »

Pourquoi l’accession sociale à la propriété n’est pas une solution ?

« Pour faire de l’accession à la propriété pour la population locale, il faut pouvoir verrouiller la destination. Cela existe : le système s’appelle le Bail réel solidaire (BRS). En revanche, pour faire un BRS qui ait du sens, qui reste accessible, il y a des prix maximums du terrain. Quand vous voulez vendre, vous devez vous adresser au propriétaire du terrain qui est généralement une foncière ou une commune pour demander l’autorisation. Vous devez aussi vendre à un certain prix à la personne qui occupera le bien dans les mêmes conditions que vous : c’est-à-dire en logement permanent. Pour réaliser ce BRS, les prix sont plafonnés, il faut que le prix du terrain soit au maximum de 450 euros le m2. À Val-d’Isère, le prix se négocie à plus de dix fois cela. Ce n’est donc pas possible, à moins que les collectivités qui en ont les moyens mettent la différence. Mais elles ne peuvent pas payer 90 % du prix. »

Sur quelles autres pistes planchez-vous ?

« Demander l’effort à ceux qui ont les moyens, les promoteurs. Ce que le maire de Chamonix a fait par exemple, en définissant des règles : vous devrez réserver 25 % du bâtiment que vous avez construit pour le vendre à un local. À des prix qui sont définis bien en dessous de ceux du marché. En contrepartie, moi je vous délivre un permis qui permet de gagner de l’argent, en vendant des biens à d’autres gens plus fortunés : c’est cela la mixité. »

En attendant, le maire a déjà prévu une mesure d’urgence d’ici l’hiver prochain. « La grande nouveauté : 120 logements saisonniers supplémentaires dans deux bâtiments créés d’ici décembre », annonce Serge Revial. Ces structures amovibles, ou préfabriquées avec des revêtements en bois, seront louées à l’année « par les entreprises qui les paieront pour leurs employés ». L’avantage ? « Avec un petit permis de construire, nous gagnons beaucoup de temps sur le juridique ». Pour les programmes immobiliers “en dur”, « il faut trois ou quatre ans de préparation : entre les autorisations et les études, c’est long… », relève aussi Yannick Amet.
Le président de la communauté de communes de Haute Tarentaise voit un autre défi à relever pour l’avenir : « La réserve foncière. Les collectivités vont être dans l’obligation d’acheter des terrains. Avec les effets pervers de la loi zéro artificialisation nette des sols (*), les prix explosent. Il y aura de moins en moins de logements. Ceux ayant vraiment des moyens importants achètent, en sachant que dans 10 ou 15 ans, ils ne pourront plus avoir une maison avec un bout de terrain. »

Conséquences pour les élus : « Nous mettons l’accent sur l’accession sociale à la propriété mais à terme nous ne vendrons peut-être plus de terrains définitivement. » Le maire de Sainte-Foy-Tarentaise a lui même misé sur la mixité pour sortir 14 appartements à « des tarifs plafonnés en fonction des ressources », dans une nouvelle résidence qui en compte 30.

« Nous ne pouvons pas tout faire à 3 000 euros du m2 , ça n’est pas possible », glisse-t-il. Vous êtes obligés de vendre des biens entre 5 000 et 6500 euros le m2 pour équilibrer. Il faut que les opérateurs qui viennent puissent rentabiliser leur investissement. Sinon, ils ne construisent pas. Pour des partenariats publics-privés, les collectivités doivent mettre la main à la poche. » Quand elles le peuvent.

*L’artificialisation des sols doit être divisée par deux entre 2021 et 2031 par rapport à la dernière décennie.

Article issu du Dauphiné Libéré

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