Six journées d’ouverture, réparties entre le 10 et le 24 janvier. C’est le triste mais peu surprenant bilan de la saison 2023-2024 pour la petite station chartrousine de Saint-Pierre/Le Planolet, avec un périmètre d’exploitation réduit au second secteur et ses cinq téléskis. « Depuis plus de soixante ans que je suis là, c’est la première fois que je ne vois pas de neige en février », se désole Bruno Cottave. « C’est bien dommage, parce que vu l’engouement et les recettes sur six jours, si on en avait travaillé 30 ou 40… »
Les bénévoles au secours
Le retraité est un des 65 bénévoles et 99 membres de la jeune association Nouvelles traces en Chartreuse, créée en septembre dernier, exploitante cette saison de la station pour le compte de la communauté de communes Cœur de Chartreuse (4C) via une délégation de service public (DSP).
Elle est composée, et c’est sa force, d’habitants et socioprofessionnels du massif et du Voironnais voisin, particulièrement attachés à leur territoire, qui ont permis cet hiver à une partie de la station de tourner, même peu, en assurant au total 5 367 heures de bénévolat en tant que perchman, caissière, dameur, à la communication ou à la gestion administrative, limitant ainsi le recours coûteux aux salariés (6 à temps partiel ; un, le pisteur, à temps plein) – pas plus mal eu égard aux difficultés de recrutement.
Repousser l’inéluctable
Des forces vives qui, dès 2022, se mobilisaient en collectif pour sauver leur station ou, tout du moins, lui permettre de fonctionner « le plus longtemps possible », jusqu’à ce que le manque de neige siffle définitivement la fin de la partie : ils restent lucides sur cette échéance « inéluctable », assure le président Yann Daniel, directeur de l’École du ski français (ESF) de Saint-Pierre-de-Chartreuse, pour qui toutefois « il n’est pas possible de s’arrêter du jour au lendemain, il faut que l’arrêt soit graduel ».
L’heure n’était donc pas au défaitisme ce jeudi soir dans la salle hors sac de Saint-Pierre-d’Entremont où les données (non consolidées) de la saison ont été présentées, pas non plus à l’optimisme béat. Déjà, et c’est une victoire en soi, les comptes ne seront pas dans le rouge, avec un bénéfice estimé à quelques milliers d’euros largement dû, a-t-il été souligné, aux partenariats noués avec des entreprises locales. « C’est ce qui nous a permis de garder la tête hors de l’eau, sans cela, on aurait pris le bouillon », assume Michel Gachon, un des adhérents. Grâce, aussi, au chômage partiel des saisonniers dont ils craignent cependant qu’il ne soit plus « automatique », à terme, pour cause de manque de neige – sur ce point aussi, les bénévoles ont dû « se battre » et défendre leurs arguments.
Enfin un modèle à garder ?
Et ils entendent continuer, déjà prêts à rempiler la saison prochaine alors que la communauté de communes doit lancer une nouvelle procédure de délégation de service public d’ici l’été, un point qui sera discuté en conseil communautaire en mai, informe la présidente Anne Lenfant, jointe par ailleurs. Car le format de DSP a, pour cet exercice 2023-2024, donné satisfaction, confirme-t-elle ; à l’inverse, la gestion de la station en régie directe est « trop chronophage » et présente un risque que la 4C ne souhaite plus assumer : si, depuis une vingtaine d’années, plusieurs gestionnaires se sont succédé, « aucun modèle n’a permis d’atteindre un équilibre financier », pointait d’ailleurs la chambre régionale des comptes dans un rapport dévoilé en décembre dernier.
Si la candidature de l’association est de nouveau retenue, « on gardera la particularité de mixer bénévoles et salariés, parce que c’est une belle osmose », juge Yann Daniel, conscient de devoir « s’adapter » et « imaginer un futur modèle encore plus collectif » pour assurer la transition de la station, main dans la main avec le public, toujours en s’appuyant sur les bonnes volontés locales, un point « clé » pour Yann Daniel.
Article issu du Dauphiné Libéré
