Deux loups en plein jour à proximité des habitations. La scène remonte au 2 février, à la limite de la commune de Megève, à l’entrée de Demi-Quartier. Cet hiver, plusieurs vidéos ou photos ont été postées sur les réseaux sociaux, au point de s’interroger sur une présence plus accrue de l’animal sur la commune de Megève.
De nombreux témoins
Toutes les images n’ont pas été certifiées par un spécialiste incontestable de l’identification du canis lupus, mais les témoignages se multiplient. « J’ai des caméras de surveillance sur mon chalet qui filment beaucoup d’animaux, et j’ai entre autres ce loup qui est passé devant mon habitation à 4 heures du matin fin janvier ». Denis Faroux vit en territoire urbanisé puisqu’il indique que son logement est à 300 mètres du téléphérique de Rochebrune.
Le prédateur ne vit plus caché sur les hauteurs, où sa présence dans les alpages du pays du Mont-Blanc est avérée. « Il est partout, confirme Arthur Forlin, le garde-chasse de Megève. On a des pièges photo un peu partout, on a aussi des pièges phoniques parce que le loup a des périodes où il chante le soir. On a le chant des adultes et le chant des petits, on a donc de la reproduction. On sait que l’on a plusieurs meutes au mont Joly ».
16 zones de présence du loup en Haute-Savoie
Les services de l’État confirment en partie mais restent plus vagues. Ce travail est réalisé par l’Office français de la biodiversité (OFB). « À l’issue de l’été 2023, l’OFB a répertorié dans le secteur du Mont-Blanc, trois zones de présence permanente de l’espèce, caractérisé “meute”, c’est-à-dire composée d’au moins trois individus ou avec une reproduction constatée ». Le mont Joly est dedans. Entre les Contamines-Montjoie et Saint-Gervais, ce secteur Mont-Blanc est lui aussi confirmé, tout comme le secteur d’Ayère au-dessus de Passy. La Haute-Savoie compte 16 zones différentes de présence permanente du loup, mais l’animal ne connaît pas les limites administratives. Les Saisies sont à portée de pattes pour cet animal très mobile.
« Les animaux ont la trouille »
Autre indice, la baisse de la faune sauvage. « Le loup va là où il y a à manger », assure Arthur Forlin. La réserve de chasse du mont Joly, qui s’étend sur le territoire de Saint-Gervais et des Contamines-Montjoie, a été créée dans les années 50, quand on ne comptait plus qu’une dizaine de chamois. Au tout début des années 2000, ils étaient 830. Aujourd’hui, les comptages montrent que la population est redescendue à 500 chamois. Les maladies ou les prélèvements des chasseurs n’expliquent pas tout, alors que l’espèce a un comportement grégaire et se déplace peu.
L’hiver était finalement une période stratégique pour apercevoir le loup. « Comme les ongulés qui viennent en zone d’hivernage, le loup descend. La faune est toujours descendue avec la neige, mais avec le loup, elle vient plus près des maisons, parce que les animaux ont la trouille », assure Arthur Forlin.
« Le loup, c’est un animal magnifique, mais il a un impact de destruction sur la faune »
Philippe Pedrono, l’ancien président de l’association communale de chasse de Megève, fait le même constat. « À Rochebrune, j’ai des cerfs dans le jardin maintenant. Je n’ai jamais vu ça dans le passé ». Il voit surtout une baisse des populations de chevreuils et de tant d’autres animaux. « Je suis allé ce week-end à Saint-Nicolas-la-Chapelle, je n’ai vu que quatre chevreuils. Il y a 20 ans en arrière, j’en aurais vu 150 ». Même la petite faune est touchée. « Avant, on avait un permis de chasse sur les nuisibles. Maintenant, on ne va plus au renard, il n’y a plus besoin de réguler le renard ».
« Le loup, c’est un animal magnifique, mais il a un impact de destruction sur la faune, explique Arthur Forlin. Entre Megève, Tré-la-Tête, le col du Bonhomme, on aurait entre 15 et 20 loups. On pense qu’il y a au moins trois meutes et puis des individus séparés ». Selon lui, sa présence permanente sur le secteur a plus de six ans, « et il y a un accroissement » des peuplements de loups.
