Visible depuis le centre-ville de Chamonix, la cavité apparue entre le 20 et 21 janvier dans la partie supérieure du glacier des Bossons, a surpris plus d’un Chamoniard. Il faut dire que les dimensions de cette dernière semblent colossales. Située non loin du refuge des Grands Mulets, au-dessus de ce que certains appellent la combe maudite, cette grotte de probablement plusieurs dizaines de mètres de diamètre intrigue. Serait-ce la solution trouvée par un courageux alpiniste pour se loger à bas coût à Chamonix ? Il n’en est rien.
Deux hypothèses s’envisagent
Pour le géomorphologue du laboratoire Edytem Ludovic Ravanel , la mise en lumière de cette cavité résulte d’un écroulement généré par l’avancée du glacier. « Deux hypothèses sont possibles quant à sa formation. La cavité peut correspondre à une ancienne poche d’eau, ce qui n’est pas impossible compte tenu de l’aérologie et de la température de ce glacier, soit elle correspond à une large crevasse », résume le directeur de recherches au CNRS.
« Bien que la taille et la forme de ce trou béant interpellent, son éclosion en plein hiver n’est pas si étonnante », prévient le spécialiste des éboulements rocheux, pour qui cette apparition aurait pu arriver n’importe quand, puisqu’elle dépend surtout du mouvement du glacier.
Pas le premier changement pour le glacier
Quoi qu’il en soit, après la naissance d’un lac glaciaire qu’il a fallu vidangé à son pied, la formation de crevasse au niveau de l’arête des Bosses à son sommet, et après l’apparition d’une brèche irréversible dans sa partie inférieure, cette cavité témoigne encore un peu plus des nombreux changements spectaculaires observés ces dernières années sur le glacier des Bossons.
« Tous ces phénomènes sont des manifestations de la déstabilisation complète de ce glacier emblématique », signale Ludovic Ravanel. « C’est d’autant plus inattendu que, jusqu’à présent, il était plutôt peu affecté par le réchauffement climatique ».
Mais comme le rappelle le scientifique chamoniard, la mue de ce géant dégoulinant de glace sur près de 3 300 mètres de dénivellation, un record en Europe, ne va faire que s’accentuer dans les années à venir. Depuis cet automne, la faille apparue au-dessus de sa langue terminale a d’ailleurs bien évolué. Désormais, trois larges taches grises rappellent que le lit rocheux prend peu à peu le pas sur la glace qui fond.
Article issu du Dauphiné Libéré