En 1933, à Megève, on construisait le premier téléphérique pour les skieurs

En août 1931, les élus réunis en conseil autour de leur maire Charles Feige, étudient un courrier envoyé par Charles Viard, industriel à Sallanches, devenu propriétaire à Megève, qui souhaite « obtenir l’autorisation de passage pour un téléphérique au lieu-dit Le Tour et également le droit de passage sur le sol communal pour la pose et l’aménagement du câble aérien sur une largeur de 15 à 20 mètres » et d’une longueur de 900 mètres.

« Ce projet rendra la station de Megève encore plus intéressante et développera le tourisme et la pratique du ski de Megève à Rochebrune par le transport des touristes et skieurs fréquentant la station » considèrent les élus qui lui accordent l’autorisation demandée.

Une cinquantaine d’arbres abattus pour créer une piste dans la forêt du Tour

Un premier contrat de concession de passage est conclu pour une durée de 99 ans moyennant un loyer, puis une redevance annuelle sur les recettes brutes. Par ailleurs, Charles Viard verse une contribution volontaire pour la construction de la route de Megève au chemin des Epennys.

En mai 1932, la durée de la concession est ramenée à 18 ans « pour raccourcir les délais d’autorisation et hâter la construction ». Un an plus tard, Charles Viard sollicite encore le conseil municipal pour obtenir leur accord afin de créer une piste de descente dans la forêt communale du Tour, ce qui nécessite l’abattage d’une cinquantaine d’arbres. L’autorisation municipale est subordonnée à l’accord de l’administration des Eaux et Forêts.

Un succès immédiat à l’hiver 1933-1934

Le téléphérique, réalisé par la société allemande Heckel, spécialisée dans les installations de transports mécaniques et aériens, est inauguré le 15 novembre 1933 et ouvre pour la saison 1933-1934. C’est le premier téléphérique construit spécialement pour le transport des skieurs en France (lire ci-contre). Et son succès est immédiat !

La station, située à 1 113 mètres d’altitude, connaît déjà parfois quelques problèmes d’enneigement. « Les deux derniers hivers ont été moins favorables. Il n’y eut de la neige qu’à partir de 1 400 mètres. Mais des services d’autocars tous les quarts d’heure emportaient les skieurs au pied des splendides champs de neige du Mont d’Arbois, relate Jean Miège dans son étude parue en 1934. Un chalet refuge, sis à Rochebrune, à 1 800 mètres a été aussi apprécié. De la sorte, la station a pu pallier sans trop d’inconvénients à la pénurie de neige. Un téléphérique vient d’ailleurs d’être installé pour mener rapidement les skieurs aux altitudes favorables ».

40 000 skieurs ont emprunté le nouvel équipement l’année de sa mise en fonction

 Les skieurs adoptent tout de suite ce nouvel équipement. Le rapport du Conseil général de la Haute-Savoie pour l’année 1934 fait état du transport de 40 000 voyageurs durant l’hiver. Marcel Ichac, journaliste à la revue La Montagne, exprime « sa surprise quant au nombre et à la qualité des skieurs rencontrés durant l’hiver 1933-34. Le responsable est le nouveau téléphérique de Megève-Rochebrune » déclare-t-il dans son article “Pour ou contre le ski sportif”.

Dans cet article, il explique que l’accroissement de la fréquentation des skieurs augmente la qualité du damage ; on parle alors déjà de ski de piste en opposition à ceux qui préfèrent faire leur trace dans la poudreuse. Mais, le succès du téléphérique ne se dément pas enregistrant 63 327 voyageurs en 1935, puis 72 000 en 1936, et 82 170 en 1937, toujours d’après les données des rapports du Conseil général de la Haute-Savoie.

Parallèlement, les grandes compétitions de ski apparaissent grâce aux deux pistes de vitesse créées sur le versant nord, ainsi que les trois pistes de promenade. « Elles sont admirablement entretenues. Rochebrune est mieux équipée que n’importe quelle autre station d’Europe » peut-on lire dans la Chronique du CAF, revue La Montagne, février 1935.

Article issu du Dauphiné Libéré