Ils dénotent presque. Sur les pistes de Morzine, à la sortie de la télécabine du Pleney, à 1 500 mètres d’altitude, quelques silhouettes marchent à contre-courant de la masse des skieurs qui descendent à toute berzingue. Les silhouettes prennent la direction du golf, réaménagé en circuit piéton l’hiver.
Si leur présence tranche quelque peu, la marche est une tendance forte, même en hiver. Selon une étude de la direction générale des entreprises intitulée “Les Français et la montagne en hiver”, l’activité la plus pratiquée par les touristes est la randonnée, devant le ski et la luge. Le ski reste toutefois l’activité la plus attractive.
« Nous skions de moins en moins »
Brigitte et Jean-Luc, vacanciers venus de l’Oise, illustrent parfaitement cette tendance. Bâtons de marche aux mains, chaussures de randonnées aux pieds, les voilà partis pour un tour de deux heures jusqu’aux Gets, avant de redescendre sur Morzine, où ils ont acheté un appartement il y a 30 ans. « Nous skions de moins en moins », confirme Brigitte. Le tarif des forfaits et des restaurants les contraint à limiter leur fréquentation des pistes. « Tout est devenu trop cher, on mange le sandwich tous les midis. On ne pourrait plus du tout acheter ici aujourd’hui », analyse-t-elle. Comptez en effet une cinquantaine d’euros par jour pour un forfait adulte sur le domaine Morzine Avoriaz.
« On préfère marcher que skier, c’est une façon différente de profiter de la montagne »
Un peu plus loin, Christine et Laurence, deux locales, évoluent dans la poudreuse avec leurs raquettes. Seul le raclement de la neige sous leur pas perturbe le silence. « On préfère marcher que skier. C’est une façon différente de profiter de la montagne. Il y a trop de monde sur les pistes, les gens vont vite, c’est dangereux ! »
« On n’est plus sur de la monoactivité »
Au village, le maire Fabien Trombert remarque que « d’années en années, les gens ne viennent plus que pour faire du ski. La piscine, le centre équestre, la patinoire sont devenus très attractifs. On fait peut-être autant de kilomètres de descente qu’avant, mais en moins de temps. Résultat, le village est très dynamique même en journée. »
En effet, nombre de restaurants sont ouverts dès 8 heures, jusqu’à la nuit. « Ça n’arrête jamais vraiment», lance une serveuse du Colibri.
À l’office de tourisme, le constat est le même : « On n’est plus sur de la monoactivité, détaille Calypso Sottavia, la directrice. Il faut dire qu’il n’y a pas autant de neige qu’espéré, ça joue forcément. Mais en règle générale, il y a un peu moins de monde dans les files d’attente et les gens se baladent là où il n’y a pas de remontées. »
Le lac des Mines d’Or, « un endroit parfait pour s’initier au ski de rando »
Pour vérifier ce fait, il faut s’aventurer à un quart d’heure de Morzine en voiture, au bout de la vallée de la Manche. Alors que la route rétrécit et qu’on pénètre un territoire plus sauvage et reculé, nombre de voitures sont garées sur le bas-côté. Ici commence le site des Mines d’Or, fréquenté sans avoir l’impression de surpopulation.
À une demi-heure de marche, le lac des Mines d’Or est gelé, entouré de montagnes. Quelques marcheurs contemplent en silence le spectacle, assis sur des bancs. Des traces de ski de fond zèbrent la neige qui recouvre la glace. De temps en temps, des luges dévalent la route enneigée qui fait office de piste et l’on croise incessamment des randonneurs à ski, qui s’arrêtent reprendre leur souffle. « C’est un endroit parfait pour s’initier au ski de rando, juge Marc, qui dit ne plus skier sur les pistes depuis longtemps. La montée n’est pas technique, on est tout de suite dans la nature. C’est une tout autre approche que les remontées mécaniques. »
Le skieur repart et disparaît dans un virage. Le silence redevient maître des lieux.
Article issu du Dauphiné Libéré