Il y a ces forts alpinistes qui voient la profession de guide comme un simple gagne-pain, et ceux qui ne s’imaginent tout simplement pas faire autre chose. Lucien Boucansaud fait partie de la deuxième catégorie. À 27 ans, le Chamoniard vient de terminer sa première saison en tant que guide diplômé. Un accomplissement pour cet enfant du Lavancher qui depuis ses premiers pas en haute montagne, rêve de devenir premier de cordée de métier. Une vocation. Une révélation même.
Un métier-vocation
Il faut dire que l’aîné de la fratrie Boucansaud a ça dans le sang. Son père Jean-Marc, décédé en 2014, avait déjà embrassé avec passion cette carrière verticale, pleine d’aventures au sommet. Après le lycée, quand d’autres cherchent encore leur voie, lui sait que la sienne passera par l’École nationale de ski et d’alpinisme (Ensa). L’adolescent fan de pêche et de grands espaces multiplie les sorties en altitude et étoffe sa liste de courses. « Je pouvais assez vite tenter l’examen probatoire pour devenir guide, mais j’ai préféré attendre de me sentir entièrement prêt », reconnaît celui qui est d’abord devenu moniteur de ski.
Fort skieur, bon grimpeur, Lucien Boucansaud se distingue surtout pour son endurance phénoménale. Lorsqu’il arpente les cimes avec ses potes, c’est presque toujours lui qui fait la trace. Des qualités physiques qui le poussent à prendre parfois le départ de quelques trails et de courses de ski alpinisme, mais qui lui permettent aussi de gravir des itinéraires techniques à une vitesse déconcertante. Avec son fidèle compagnon de cordée Guillaume Pierrel , ils ne mettent par exemple que 18 heures pour parcourir l’intégrale de Peuterey depuis le val Veny, la plus longue course d’arête des Alpes.
Des mont Blanc à la journée partagés avec des clients très entraînés
Le lève-tôt couche-tôt qui ne cache pas sa timidité a su aussi s’entourer de professionnels expérimentés pour apprendre et progresser. La voie Gervasutti dans la face est des Grandes Jorasses partagée avec David Autheman, l’aiguille Verte depuis chez lui avec Jeff Mercier… « Ce qui me plaît en montagne et dans mon métier, c’est avant tout la transmission », insiste l’un des rares guides à proposer à des clients très entraînés de gravir le mont Blanc à la journée. « Je l’ai déjà fait avec plusieurs finishers de l’Ultra trail du Mont-Blanc (UTMB). À chaque fois c’est un défi sportif que j’adore ».
Alpiniste aussi brillant que ses yeux bleus perçants, Lucien Boucansaud ne cherche pas la lumière. Jeune père d’une petite fille, le gamin du pays aspire à la tranquillité et s’imagine encore guider à soixante ans passés. Avec toujours la même flamme et la même humilité.
