Pour trouver du blanc en ce début novembre, il faut aller très haut.
À plus de 2900 mètres, dans le fief des alpinistes, où des as du ski extrême ont glissé des pentes inédites en Vanoise ou dans le Mont-Blanc. En deçà, l’anticyclone a séché les flocons d’automne. Pas de quoi affoler la grande majorité des stations, qui n’ouvrent pas avant mi-décembre.
Et les chutes prévues la semaine prochaine devraient influer sur le moral.
2,7% de progression annoncé
Pour l’heure, il est plutôt bon, si on s’en tient aux chiffres. Pour Noël, les taux d’occupation s’affichent en hausse de 5 %, selon le baromètre de l’Association nationale des maires de stations de montagne (ANMSM).
Pour Denis Maurer, patron du cabinet G2A, la progression sur la saison serait de 2,7 %. Avec une intersaison de janvier en passe de prendre des airs de vacances de février. Mais mars s’annonce plus difficile et, pour l’expert en analyse touristique, la fin de saison pourrait peser dans le bilan.
Les grands domaines connaissent une croissance à deux chiffres, quand les stations de charme, d’altitude plus modeste, semblent combler leur retard, avec un niveau de réservations proche de l’équilibre. Autre indicateur significatif de la santé de l’écosystème, les Écoles de ski français ont déjà vendu 200 000 semaines de cours, 17 % de plus que l’an dernier.
La solidarité inter-montagnards
Pour Jean-Luc Boch, maire de La Plagne et président de l’ANMSM, « ces chiffres sont exceptionnels, d’autant qu’ils s’inscrivent à la suite de l’une des meilleures saisons, malgré les disparités. Ils attestent de l’engouement pour la montagne. Et n’oubliez pas que 70 % de la clientèle est française ».
L’environnement était le maître mot de la conférence de presse de France Montagnes, jeudi soir à Paris. Revendiquant leur « esprit de cordée », en octobre, ses trois acteurs majeurs ont contribué, financièrement, à offrir à la station de l’Alpe du Grand Serre (Isère), menacée de fermeture, un sursis. « On ne se réjouit pas quand certains sont en difficulté », insiste Jean-Luc Boch. Suivant leur slogan du moment, “Une montagne en mouvement”, les professionnels ne sont pas sourds aux injonctions de l’époque.
« La réalité est nuancée »
Signe de leur adaptation : l’outil Climsnow, conçu par Météo France, l’INRAE et le cabinet Abest qui, à l’aune des projections climatiques, permet de définir l’avenir de la skiabilité et calibrer les investissements d’une station pour maintenir, amender ou arrêter l’activité.
À moins de 2000 mètres, on a perdu un mois d’enneigement en 50 ans. Et chaque degré de plus, c’est encore un mois en moins. « Entre ces deux visions extrêmes, l’une qui dit que le ski est mort et l’autre que tout va bien, la réalité est nuancée », a rappelé Carlo Carmagnola, chercheur à Météo France, l’un des concepteurs de Climsnow.
« C’est devenu notre outil de gouvernance basée sur un travail scientifique », insiste Anne Marty, présidente du syndicat des exploitants de remontées mécaniques, pour qui, désormais, la montagne l’hiver, « c’est le ski et bien plus. »
Dans 30 ans, « 80 % des stations proposeront encore du ski »
Son indicateur de vitalité des villages de montagne ? « Les rires d’enfants dans les cours d’école. Car sans économie pas de vie dans les territoires ». Yves Dimier, vice-président de DSF, renchérit : « Climsnow montre que 80 % de nos 250 stations proposeront encore du ski en 2050. »
Quid de la neige de culture et de la consommation d’eau ? Jean-Luc Boch se veut transparent : « En France, c’est 35 millions de m3. Quand on regarde le volume des fuites, soit plus d’1,35 milliard, on pourrait produire 50 ans de neige avec ! »
À la tête des 16 500 pulls rouges, Éric Brèche, président des ESF, qui fêteront leurs 80 ans en 2025, rappelle que les montagnards ont toujours été en mouvement : « Mais on n’a jamais pris un porte-voix pour le dire. »
Article issu du Dauphiné Libéré.
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