L’alpinisme et l’escalade sont-ils le futur du tourisme en montagne ?

Une délégation haut-alpine était présente au 5e Salon de l’escalade, organisé pour la première fois à Paris, ces 11 et 12 janvier. Avec la volonté de capter vers le département une clientèle pratiquante de l’escalade et de l’alpinisme. Explication avec Yvan Chaix, directeur de l’Agence de développement économique et touristique des Hautes-Alpes (Addet 05) :

Photo Thibaut Durand.
Photo Thibaut Durand.

L’Addet, aux côtés d’autres organismes haut-alpins, a participé au Salon de l’escalade pour promouvoir le département auprès du public de grimpeurs et d’alpinistes. Quels sont ses atouts ?

« Dans le département des Hautes-Alpes, l’alpinisme et l’escalade occupent une place un peu à part. Notre département est attractif parce que l’on y trouve parmi les plus beaux spots au monde, qu’il compte de grands champions, et parce que l’on organise, année après année, de grands événements. Les falaises de Céüze , d’Orpierre et d’Ailefroide sont parmi les plus renommées au monde. Les pratiques de l’alpinisme dans le massif des Écrins sont, là encore, connues de par le monde. On a cette spécificité-là et il faut que l’on soit capable de faire valoir cette identité et ses avantages, d’où notre présence à ce salon. Chaque année, nous avons des opérations pour promouvoir la filière et on essaie de les renouveler. Celle-ci a du sens car le public parisien – et urbain de manière générale – est intéressant : on a vu ces dernières années la pratique de l’escalade en salle exploser et on a d’ailleurs conduit des opérations de partenariat avec des grandes salles françaises pour faire basculer ce public de lieux de vie urbains à nos milieux montagnards. »

Que représente ce public dans la fréquentation touristique des Hautes-Alpes ?

« On a conduit, avec l’institut de sondage BVA, des grandes enquêtes sur nos clientèles. Et on a été heureusement surpris de voir que la part des clients qui séjournent chez nous au printemps, en été et en automne, pratiquant ces activités occasionnellement ou régulièrement, représente 12,4 % de la clientèle [pratiquant l’alpinisme, l’escalade et/ou la via ferrata, NDLR]. Ce sont des chiffres conséquents. Et ce qui est encore plus intéressant, c’est que l’on mesure que pour bon nombre de ces clients, ce sont ces pratiques qui ont déterminé le choix de destination et l’acte d’achat. Ils sont venus chez nous pour ça. Ces clients sont de plus en plus nombreux, de plus en plus jeunes, et très divers : la majorité vient de France, mais une bonne part vient de pays pratiquant ces activités. »

Quel poids économique pèse cette clientèle ?

« Elle représente un poids économique non-négligeable. La dépense moyenne des estivants dans les Hautes-Alpes est 55,40 euros par jour et par personne. Pour les pratiquants de l’escalade et de l’alpinisme, cette moyenne est de 64,30 euros. C’est, bien évidemment une moyenne : on sait, par exemple, que pour la pratique de l’alpinisme, on est souvent sur des longs séjours avec un encadrement professionnel. À l’inverse, on peut avoir une part de la clientèle de grimpeurs composée de baroudeurs. Mais ce tourisme génère de l’économie. Le meilleur exemple est celui d’Orpierr e : avec des falaises très appréciées, l’essentiel de son économie – que ce soit les logements, la restauration ou les autres commerces – est tourné vers la grimpe. Ce sont vraiment des pratiques qui font l’identité des Hautes-Alpes et il faut que l’on cultive cela. C’est souvent ce qui nous différencie d’autres destinations touristiques et il est donc important de faire un effort envers ces clientèles en termes d’aménagement, de promotions et d’événementiel. »

Le chiffre : 38 000

C’est le nombre de “journées grimpeur” sur une année à Orpierre et ses près de 700 voies d’escalade, selon l’Agence de développement économique et touristique des Hautes-Alpes.

L’alpinisme est très impacté par le réchauffement climatique. Peut-on encore promouvoir cette discipline sur le plan touristique ?

« Ce sont des disciplines effectivement, et peut-être davantage l’alpinisme que l’escalade, qui sont vraiment sur la ligne de front du réchauffement climatique. Avec la nécessité, pour des raisons de sécurité, de redessiner les lignes de courses ou encore de changer les dates des séjours. Oui, cela nous frappe de plein fouet, mais il y a une très forte mobilisation des acteurs concernés, comme les refuges, les guides ou les secours, pour repenser l’activité. Et, malgré tout, l’activité se porte bien. On s’efforce, en tout cas, de les accompagner au mieux : on a initié il y a quelques années, avec le parc national des Écrins, un programme assez ambitieux avec les Villages d’alpinisme , qui porte ses fruits. Celui-ci permet de faire vivre ces lieux et ces pratiques avec, récemment, quelques aménagements d’écoles d’escalade à proximité immédiate des Villages d’alpinisme. Pour, justement, faire le lien entre ces deux pratiques. »

En escalade, le département compte des événements nationaux et internationaux. Mais il va y avoir un grand absent en 2025 : le Mondial de l’escalade, et son étape de Coupe du monde, à Briançon. Quel préjudice cela peut-il porter à la promotion touristique ?

« Il faut que chacun ait à l’esprit tout ce que le Mondial de l’escalade a apporté aux Hautes-Alpes et à la discipline. L’escalade se porte bien dans le département et, de toute évidence, le Mondial en est une pièce essentielle. C’est donc forcément une perte. Mais les acteurs restent là, le mur est à demeure et je ne doute pas que l’on saura se réinventer et faire vivre la pratique. Oui, il y aura un impact en termes d’image, de fréquentation et de consommation sur cette période du Mondial. Mais, il ne faut pas sous-estimer l’effet de traîne des événements. On le voit bien avec d’autres disciplines comme le Tour de France et notamment l’arrivée au col du Granon en 2022  : cela a changé définitivement la place du col, avec une fréquentation qui n’a cessé de croître, depuis. »

Les principaux événements de grimpe cette année

En 2025, trois événements d’escalade sont au programme. À commencer, dès ce 16 janvier, par l’Ice Climbing Écrins à L’Argentière-la-Bessée avec une Coupe d’Europe d’escalade de glace. Suivra, au printemps, l’Outdoormix festival à Embrun (du 6 au 9 juin), grande réunion des disciplines extérieures : avec du bloc et un concours de jeté. Enfin, retour à L’Argentière-la-Bessée du 21 au 26 juillet pour le Tout à Bloc.

Les Hautes-Alpes sont, en revanche, sorties du circuit international de l’escalade de difficulté et de vitesse. Briançon n’accueillera en effet plus d’étape de Coupe du monde sur son mur extérieur. De facto, le Mondial de l’escalade – événement d’animations et de compétitions autour de cette étape – n’est pour le moment plus d’actualité. Briançon accueillera cependant le championnat de France UNSS dans le courant du mois de mai.

Article issu du Dauphiné Libéré

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