Pourquoi ces 7 statues dans le Mont-Blanc ? L’enquête de ce documentaire

Il n’y a que la magie du cinéma pour revivre une ascension effectuée il y a bientôt deux ans, sans perdre une miette d’émotion. Lors de la première projection de La Madone , Lucien Boucansaud fut à nouveau happé par ce voyage qu’il avait partagé avec Guillaume Pierrel autour du toit des alpes.

En juin 2023, les deux copains devenus ensemble guides de haute montagne avaient gravi les sept sommets coiffés d’une statue de la Vierge dans le massif du Mont-Blanc.

« Nous aimons croire à une forme de protection en montagne »

Un périple qui n’avait duré que onze jours, mais qui avait démarré plusieurs mois auparavant, lorsque Lucien découvrit dans la grange familiale, par hasard, des photos de la cordée ayant monté la Vierge sur le sommet du Grépon, en 1927. Intrigués, les deux amis eurent ainsi l’idée d’aller rendre visite aux sept Madone du Mont-Blanc lors d’un enchaînement alpinistique de premier plan.

Une aventure sportive de 130 km et 16 000 mètres de dénivelé et un clin d’œil aux anciens montagnards venus hisser ces statues censées protéger les alpinistes et les habitants des vallées. Pour mieux emboîter le pas à ces derniers, Lucien et Guillaume avaient d’ailleurs fait le choix de n’emprunter ni voiture, ni remontées mécaniques.

« Nous ne sommes pas des Chrétiens pratiquants, mais nous aimons croire à une forme de protection en montagne », confient ceux pour qui cette solide performance a aussi pris la forme d’un voyage intérieur. Mais pour ses jeunes guides, très admiratifs de leurs aînés, l’histoire introspective avec les madones du Mont-Blanc ne s’est pas arrêtée là.

Un documentaire de son propre genre

Déjà réalisateur d’un premier documentaire rendant hommage aux « mentors » qui l’ont conduit jusqu’à skier le Gasherbrum II (8 035 m) au Pakistan , Guillaume Pierrel avait en tête de faire un film de cette épopée. Un projet chronophage pour lequel l’alpiniste de 39 ans s’est, cette fois, encordé au cinéaste de métier Laurent Jamet, séduit par cette ascension pas banale.

Ce réalisateur expérimenté avait d’ailleurs suivi, quand il le pouvait, les deux grimpeurs endurants, afin de rapporter quelques précieuses images, en plus de celles captées par un droniste aguerri et celles rapportées par les deux alpinistes à la recherche de réponses.

« Nous avions chacun notre vision et elle fut complémentaire », assurent aujourd’hui les deux coréalisateurs, heureux d’avoir réussi à rester sur la crête qui place leur moyen-métrage à mi-chemin entre un documentaire historique et un film centré sur la performance sportive.

Une ode à un alpinisme entre terre et ciel

Surpris comme les alpinistes par l’importante quantité de neige à l’aiguille Noire de Peuterey (3 773 m), le spectateur admire avec eux le lever de soleil sur la tour Ronde (3 792 m) avant de planer jusqu’à la dent du Géant (4 013 m). À peine remis de la beauté environnante, il décolle à nouveau, en parapente cette fois pour suivre les deux guides enquêteurs jusqu’au verdoyant val Ferret où l’on charge des skis sur un vieux tandem pour atteindre le point de départ du mont Dolent. Dans cette épopée, Guillaume Pierrel et Lucien Boucansaud avaient voulu utiliser tous leurs jouets. Mais le rythme effréné de ces montagnards ultra-endurants n’épuise pas l’assistance. Au contraire, les performances XXL de ces champions sont diluées avec beaucoup d’humilité.

Un parti pris qui serte le propos. Les vrais héros ne sont pas ces athlètes des cimes curieux, mais les braves qui ont eu l’idée d’aller poser ces Vierges. En Suisse, ils retrouvent Justin Marquis, un guide ayant lui aussi voulu porter une statuette de la Vierge, un fardeau sacré qui veille désormais sur le petit clocher du Portalet (2 985 m). De madone en madone, d’illustres grimpeurs interrogent leur rôle et les croyances qui leur sont associées. Catherine Destivelles , Étienne Klein , Sylviane Tavernier, Mario Colonel… Des interviews pour prendre encore un peu plus de hauteur jusqu’aux Drus (3 754 m) et au Grépon (3 482 m) où les alpinistes ont l’impression d’être attendus par ces visages. Une ode à un alpinisme où les cordées acceptent d’évoluer entre et terre et ciel, dans un austère paradis où l’homme est remis à sa juste place.

Au programme de plusieurs festivals

Un subtil équilibre qui permet au spectateur d’embarquer dans cette expédition entraînante, où des instants de contemplation ponctuent une riche enquête sur ces Vierges, patrimoine méconnu que se partagent l’Italie, la Suisse et la France, unies par le Mont-Blanc.

À l’affiche du festival international du film Aventure et découverte de Val d’Isère cette semaine, La Madone reviendra ensuite dans la capitale de l’alpinisme pour le Chamonix film festival. Mais nul doute que cette quête pour venir à bout des mystères qu’abritent ses sept statuettes sacrées plaira bien au-delà des frontières parfois fermées du film de montagne.

Article issu du Dauphiné Libéré

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