Serre-Chevalier et ses passoires thermiques, pourquoi est-ce un problème ?

En 2023, 78 % des lits touristiques de Serre Chevalier sont diagnostiqués ou estimés comme « passoires thermiques », c’est-à-dire avec un DPE (diagnostic de performance énergétique) classé F ou G*”, peut-on lire sur le site officiel du SIVM, le syndicat intercommunal à vocations multiples de Serre Chevalier.

Ce syndicat regroupe les communes de Saint-Chaffrey, La Salle-les-Alpes et Le Monêtier-les-Bains. Parmi les missions du SIVM, la rénovation de l’immobilier de loisir.

Au niveau national, un programme est piloté par Atout France, nommé France tourisme ingénierie, « Rénovation des stations ». Un appel à manifestation d’intérêt a été lancé en 2021. Vingt-cinq stations ont été retenues, dont Serre Chevalier. Selon le site officiel d’Atout France, « le programme vise à accélérer la rénovation globale de l’immobilier de loisir sur les cinq prochaines années ».

« un projet a été identifié. » »

Le président du SIVM et maire du Monêtier-les-Bains, Jean-Marie Rey, s’inquiète du devenir de ces résidences secondaires : « Le SIVM a fait le tour des copropriétés, des particuliers pour pousser à la rénovation. Nous avons eu des difficultés à obtenir des réponses et l’accord de tous les propriétaires. Mais, un projet a été identifié. »

Il s’agit de l’immeuble Le Télécabine, à l’Aravet, à La Salle-les-Alpes. Il sera accompagné par Atout France au niveau de l’ingénierie. Le projet pourrait consister à rajouter un étage à l’immeuble afin de vendre des appartements à des particuliers.

Cette vente financerait les travaux d’isolation, de menuiserie. « Cette mission du SIVM est très importante car 80 % des résidences sont secondaires à Serre Chevalier, poursuit Jean-Marie Rey. D’ici 2034, une bonne partie des logements classés E, F et G, ne pourront plus être loués. »

Selon le site du ministère de la Transition écologique et de l’Aménagement du territoire, « le diagnostic de performance énergétique (DPE) renseigne sur la performance énergétique et climatique d’un logement (étiquettes A à G). Il sert notamment à identifier les « passoires énergétiques » (étiquettes F et G du DPE, c’est-à-dire les logements qui consomment le plus d’énergie et/ou émettent le plus de gaz à effet de serre) ».

« Cela va nous demander beaucoup d’argent »

Jean-Claude Vinatier est le président du conseil syndical de l’immeuble Le Télécabine. Ce dernier comprend deux copropriétés, d’une centaine d’appartements au total. Cet immeuble a été sélectionné dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt. « Le SIVM (syndicat intercommunal à vocation multiple, NDLR) a fait une grosse promotion pour la réhabilitation, et nous avons postulé. Il a joué un rôle intermédiaire. Et Atout France nous apporte une aide d’ingénierie, un accompagnement humain, c’est intéressant d’avoir des spécialistes », précise le président.

L’immeuble date de 1962. « Même si nous avons déjà mené des travaux, il y a une chaudière fioul de cette époque et tout un système de chauffage probablement à revoir, l’isolation aussi… Cela va nous demander beaucoup d’argent. Le coût risque d’être élevé », estime-t-il.

La réflexion consiste donc à surélever l’une des deux copropriétés d’un étage. « On vendrait le droit à construire à un promoteur qui aménagerait des appartements. Il s’agit d’une possibilité pour financer les travaux. Il y a toujours eu une démarche de progrès dans l’immeuble, par exemple nous avons construit un ascenseur. »

En novembre a été votée l’exécution des diagnostics qui auront lieu au printemps. Les résultats devraient être connus en juillet. « Puis, on décidera alors des travaux. 70 % des propriétaires ont été favorables au diagnostic, qui donnera les éléments qui nous permettront de voir si ça vaut le coup de mener ces travaux. »

Immeuble le Télécabine place de l'Aravet, à La Salle-les-Alpes Photo Audrey Lungo
Immeuble le Télécabine place de l'Aravet, à La Salle-les-Alpes Photo Audrey Lungo

« La non-location de toutes ces résidences va impacter la station »

Les biens classés F ou G font ainsi progressivement l’objet de dispositions visant notamment à interdire ces logements à la location via l’exigence d’un niveau minimal de performance. Cela conduira à considérer comme logements non décents  : les logements classés G à compter de 2025 ; les logements classés F à compter de 2028 ; les logements classés E à compter de 2034.

L’objectif est également financier : « La non-location de toutes ces résidences va impacter la station, poursuit Jean-Marie Rey. Il y aura une perte économique due à la non-location aux touristes. Ce qui bloque les propriétaires, c’est l’aspect financier. Des dispositifs existent pour les résidences permanentes, pas pour les secondaires. Ajouter un étage à l’immeuble du Télécabine, par exemple, permettra de générer des recettes. »

L’objectif vise à pérenniser l’attractivité de ces lits touristiques, et donc de la station. Mais ce que craint également le président du SIVM, c’est « la location anarchique, sans déclaration de taxe de séjour ».

* Selon une étude Conitiff, Connaissance de l’immobilier touristique à partir des informations foncières et fiscales

En chiffres

Dans les Alpes du sud, à l’horizon 2034, sans rénovation énergétique, la perte est estimée à -200 000 nuitées en été et -700 000 nuitées en hiver, selon les estimations d’Atout France.

 

Article issu du Dauphiné Libéré

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