Le 29 avril 2019. Les Alpes s’apprêtent à livrer une bataille comme elles n’en ont jamais vécu jusque-là. Leurs hommes marchent sans le savoir vers un pas dans le vide qui va précipiter l’humanité tout entière dans une inconnue apocalyptique. Une faille spatiotemporelle vient de s’ouvrir. Ils ne l’avaient ni anticipée, encore moins imaginée voire étudiée comme ce futur 2050 qui va rebattre toutes les cartes IGN. Mais qui y a-t-il de pire que le réchauffement climatique ? Une attaque extraterrestre, pardi. Et ça, ils ne l’avaient pas vu venir.
En Isère, au Plateau des Petites-Roches
Adaptée du roman éponyme de H.G Wells, la première saison de la série événement de Canal + « La Guerre des Mondes », écrite par Howard Overman (Misfits) et tournée en deux langues entre la France et l’Angleterre, vient de débarquer dans les montagnes françaises. Plus exactement l’équipe de tournage a posé ses caméras en Isère. Sur le meilleur des plateaux, un décor naturel où le maquillage peut rester au vestiaire, Le Plateau des Petites-Roches.
C’est dans le tunnel caverneux de Saint-Pancrasse que vont se jouer les premières scènes de La Guerre des Mondes. C’est là, dans cette brèche entrouverte dans ces Alpes majestueuses, que surgit Léa Drucker. On est à quelques kilomètres de Grenoble, trois battements d’ailes à peine d’une terre d’envol mythique pour Objets volants non identifiés (Ovni). Ici, tous les ans, s’ébroue dans le ciel le plus grand rassemblement de parapentes au monde, la Coupe Icare.
Léa est cette astrophysicienne, la première, à découvrir le signal extraterrestre. Elle est l’origine de la catastrophe. Elle serre fermement une enfant dans ses bras. Une fragilité toute relative, mais solidement encadrée par plusieurs militaires, dont un certain Adel Bencherif. Dans le quartier de la Villeneuve, à Grenoble, où se joue une tout autre guerre, celui qui endosse le rôle du colonel Mustafa Mokhrani, est devenu une star depuis le film « Un Prophète ». Enfin surtout depuis qu’il a tourné dans une autre série culte, « Validé ».
La scène est ultra-protégée par les contreforts de Chartreuse, mais plus encore par des producteurs qui ne veulent voir aucune personne extérieure au tournage. Ils ont tout verrouillé. Cette création originale, où chacun des huit épisodes frôle les 3,5 millions de dollars, doit garder le mystère. Seuls quelques journalistes ont reçu un sésame, du pain béni, pour découvrir une infime petite partie de l’envers du décor.
Dans les Hautes-Alpes, sur le plateau de Bure
Plus loin, sur le plateau de Bure dans les Hautes-Alpes, à 2500 m d’altitude, les rafales glaciales et la neige sont des remparts efficaces contre les paparazzis. Et ceux qui ont osé braver cet environnement hostile font face non pas à des extraterrestres mais des agents de sécurité qui ont les moyens de faire rebrousser chemin aux plus récalcitrants. Le site est lui aussi frappé par le secret militaire de la production.
« Il y a sûrement d’autres choses dans d’autres systèmes »
Réalisée par le Belge Gilles Coulier et l’Anglais Richard Clark, ce premier opus a clairement l’ambition de survivre à l’apocalypse créée par Steven Spielberg en 2005 avec Tom Cruise. Coulier apporte cette touche sombre, la marque de fabrique des Flamands, un clair-obscur qui donne la réplique au rocambolesque de Clark, le seul Anglais à avoir su dépoussiérer « Versailles » pour en faire un chef-d’œuvre de série baroque et rock à la télé.
Cette histoire qui unit une poignée de survivants à cette invasion extraterrestre, prêts à tout pour échapper à l’apocalypse, a convaincu Léa Drucker. Elle nous confiait le soir, au bar de l’hôtel grenoblois où toute l’équipe logeait, en croquant des glaçons, son « péché mignon », avoir été séduite par l’idée « qu’il y a sûrement d’autres choses dans d’autres systèmes. Je ne sais pas si de mon vivant, je verrai quoi que ce soit ».
L’actrice allait enchaîner deux autres saisons après celle-ci aux côtés du beau Gabriel Byrne, bien conservé malgré le stress des robots chiens envahisseurs.
Jouer la sidération « a été le plus dur » et lui a demandé de sortir de sa zone de confort. « Je me suis demandé durant le tournage comment je réagirai si ça m’arrivait ? » Elle a repensé à cette peur primaire que l’on ressent, enfant, quand, plongé dans la nuit noire de sa chambre, on s’imagine des monstres imaginaires.
Un an avant le Covid
Mais ces monstres-là sont bien réels, suggérant à Adel Bencherif, qui ne survivra pas au premier épisode de la saison 2 : « Ce serait peut-être bien que ça nous arrive un jour finalement. Plus de racisme. Les ennemis ne seraient plus les noirs, les Arabes, ou les Chinois. Ils viendraient d’ailleurs ce serait parfait, non ? »
C’était un an avant le Covid, un ennemi sournois sorti d’un labo plongeant le monde dans un chaos viral… et dystopique vidant les capitales, les villes et villages du monde entier de toute présence humaine. Une Guerre des Mondes…
Article issu du Dauphiné Libéré