Loi « Airbnb » : qu’en pensent les maires des stations de ski ?

Après un parcours parlementaire de deux ans, la proposition de loi dite « Airbnb », visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l‘échelle locale, a été définitivement adoptée par le Parlement et publiée au Journal officiel le 20 novembre dernier.

Pensé comme une “boîte à outils” visant à réguler les meublés de tourisme, ce texte permet à toute commune, sans restriction de nombre d’habitants, de bénéficier d’un cadre législatif élargi. Que ce soit en plaine ou en station, les divergences d’opinions sur ce texte traduisent la diversité des enjeux isérois.

En montagne, les plateformes d’hébergements touristiques type Airbnb, Booking et Abritel, ont séduit de nombreux propriétaires. À l’Alpe d’Huez, ces intermédiaires sont devenus « des incontournables », selon Cécile Arsenne, chargée des meublés touristiques à la mairie, qui ajoute que « le reversement de la taxe de séjour de toutes les plateformes s’élève, en 2024, à 530 000 euros contre 445 960 en 2023 ». Un chiffre qui représente plus de 2 000 locations par semaine pour la station. Une forte implantation due à la flexibilité de ces acteurs économiques.

Si les maires des stations sont d’accord sur le constat d’efficacité des plateformes de location, des disparités émergent quant à la volonté d’encadrement prévue par cette nouvelle loi. Des divergences qui s’expliquent par la structure économique des domaines skiables. Plus la station est dépendante des flux touristiques de courts séjours, plus elle sera réticente à contenir l’activité des plateformes locatives.

L'Alpe d'Huez. Photo Le DL/Stéphane Pillaud
L'Alpe d'Huez. Photo Le DL/Stéphane Pillaud

« Ces locations sont au cœur de notre économie »

À Chamrousse, « 90 % des logements sont des résidences secondaires louées par intermittence », stipule la maire Brigitte de Bernis. Une situation spécifique qui enjoint l’élue à rester prudente vis-à-vis de la nouvelle législation. Elle redoute notamment les conséquences de la diminution de l’abattement fiscal dont bénéficient les propriétaires : « Le risque, c’est que la location devienne moins intéressante et que les propriétaires arrêtent de louer, ou louent de manière occulte », craint-elle avant d’ajouter : « Ces locations sont au cœur de notre économie, on ne peut pas faire sans elles ». À Chamrousse, la taxe de séjour reversée par les plateformes de location représente 20 % du total de la taxe de séjour perçue. Une réalité économique qui varie en fonction de la station.

Les maires de Vaujany et de l’Alpe d’Huez voient, quant à eux, d’un très bon œil ce nouveau texte législatif : « Ce n’est pas du tout une loi anti-Airbnb, simplement une aide à l’encadrement de cette pratique et nous en sommes contents », affirme Jean-Yves Noyrey, maire d’Huez. Une ressource légale aux volets multiples, dont l’équipe municipale uissane compte bien se saisir pour endiguer le manque de résidences principales : « On souffre d’un manque d’habitats permanents or, avec le réchauffement climatique, on devra penser notre économie à l’année et donc avoir plus de résidents annuels », estime Jean-Yves Noyrey. Un enjeu déjà pris en compte par la station qui avait inscrit dans son Plan local d’urbanisme (PLU) des zones réservées à la construction de résidences principales.

« Beaucoup de peine à loger les saisonniers »

Cette problématique rejoint la difficulté croissante des saisonniers à trouver un logement pour la saison hivernale : « On a beaucoup de peine à loger les saisonniers », admet Yves Genevois, maire de Vaujany, partageant son constat avec ses homologues d’Huez et de Chamrousse. Une difficulté liée « à l’attractivité de certaines stations » pour Brigitte de Bernis, mais aussi au transfert des locations meublées sur le marché touristique de courte durée : « Aujourd’hui, comme les propriétaires rénovent leurs appartements, ils les mettent sur le marché touristique qui est bien plus rentable », avance Jean-Yves Noyrey.

Une modernisation des hébergements que la mairie d’Huez et d’autres stations souhaitent toutefois accompagner et renforcer grâce au diagnostic de performance énergétique (DPE) rendu obligatoire par la loi : « Nous sommes déjà en pleine politique de rénovation, donc nous ne sommes pas concernés par cette mesure, mais c’est une bonne chose », assure la maire de Chamrousse. Même son de cloche du côté de Vaujany : « On a déjà anticipé la transition énergétique », indique Yves Genevois. Quelle que soit l’opinion des maires de station, ils n’abaisseront pas le plafonnement à 90 jours de la durée légale annuelle de location d’un bien, jusqu’à présent maintenu à 120 jours.

Article issu du Dauphiné Libéré

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