Dans un autre article, on vous présentait le pastoralisme comme l’un des bijoux du Parc de la Vanoise.
Mais avec la présence de chiens de protection pour ces troupeaux, c’est aussi une épineuse question qui se pose sur l’équilibre à trouver avec d’autres acteurs de la montagne : les touristes
Un public mal informé
« Les gens ont besoin de discuter », souligne Maryline, animatrice pastorale au Parc national de la Vanoise après un échange avec un groupe de randonneurs à proximité du refuge du plan du lac.
Pour elle, aucun doute : depuis le début de ses missions à la fin du mois de juin 2024, elle constate un manque et un besoin d’information sur le pastoralisme des visiteurs croisés dans le parc.
Avec Noé et Arnaud, tous deux âgés de 24 ans, l’ancienne gardienne du refuge de l’Orgère (également situé dans le parc) est missionnée par le Parc pour apaiser une situation délicate. Depuis quelques années, Xavier Eudes, directeur du Parc national de la Vanoise, constate la multiplication de « signaux de tensions » entre visiteurs et exploitants agricoles.
Des intérêts opposés entre visiteurs et alpagistes
D’un côté, des visiteurs, adeptes de la montagne et des grands espaces. À vélo, en randonnant ou en courant, ils sillonnent le parc jour et nuit, en quête de dépaysement ou de performance sportive.
De l’autre, des alpagistes, vivants de leur travail, et celui de leurs animaux, dans les pâturages de la Vanoise. Au cœur du parc (et des tensions) se partage ainsi un espace vu comme un terrain de jeu ou une terre à valoriser économiquement.
C’est sans compter l’arrivée d’un nouveau public urbain depuis la pandémie de Covid-19, ne possédant pas nécessairement les codes de la montagne.
Un problème croissant
Ces dernières années, le directeur Xavier Eudes pointe une hausse des bergers interpellés, des clôtures non fermées, et, au cœur des discordes, des rencontres avec les chiens de protection des troupeaux.
Pour Michelle Arnaud, membre du syndicat ovin de Savoie et possédant un alpage dans le parc, il y a un « gros besoin de communication » pour juguler cette « boule de feu ».
D’où une volonté affichée par le Parc d’essayer de résoudre, par la médiation, les différends entre activité touristique et pastorale, à la demande du syndicat ovin de Savoye.
Des médiateurs à la fois formés et formateurs
C’est ainsi qu’à l’été 2023, deux premiers médiateurs – ou animateurs pastoraux – étaient désignés pour aller « au contact du public et des éleveurs » selon Xavier Eudes. À la suite du succès du premier été, l’opération a été reconduite à l’été 2024.
Au terme d’une formation de quinze jours, auprès de la Société d’économie alpestre de la Savoie, d’exploitants agricoles, de bergers ou de gardes du parc, ils parcourent la Vanoise pour sensibiliser le public à l’activité pastorale.
Parfois présents en office de tourisme ou sur des manifestations telle la Transmaurienne, c’est au sein du parc qu’ils sont le plus souvent présents.
Au fil de la journée, ils essaient de capter des publics différents : des itinérants, et traileurs de l’aube, aux familles et autres randonneurs aux alentours de midi.
« Essayer de ne pas faire peur »
Leur activité se concentre sur le versant mauriennais du parc, des communes de Modane à Bonneval-sur-Arc. En raison de la plus forte présence d’ovins, et donc de chiens de protection, « le cœur du sujet, c’est la Maurienne », explique Xavier Eudes.
Auprès des visiteurs, Maryline « essaie de ne pas faire peur », mais plutôt de « proposer des scénarios » en cas de rencontre avec un chien, et des manières de « décrypter leur langage »
Des solutions numériques
Pour les plus angoissés, les médiateurs réorientent vers le site” Pasto kézaco”, premier site d’information dédié à la sensibilisation au pastoralisme en montagne.
À l’initiative du Réseau pastoral Auvergne-Rhône-Alpes, le site propose une “map patou”, localisant les alpages et estives protégés par des chiens de protection. Quand ils ne sont pas auprès des visiteurs, ils rencontrent les bergers et éleveurs pour entendre leurs requêtes.
Un public de bonne volonté
Alors que le Parc national de la Vanoise s’apprête à accueillir son pic de visiteurs, l’opération semble être un succès. Noé, animateur pastoral, s’enthousiasme : « Les gens sont hyper-réceptifs et très à l’écoute », notamment le public urbain, moins informé, mais plus intéressé.
Michelle Arnaud, au nom du syndicat ovin de Savoie, est ravie de cette évolution : « On nous entend. Ça va dans le bon sens », ajoute-t-elle, consciente qu’un changement des comportements prendra du temps.
Article issu du Dauphiné Libéré.
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