Casserousse, la piste olympique de Chamrousse : l’héritage de Jean-Claude Killy

Comment une pente aussi naturelle a-t-elle pu glisser vers ce mythe olympique ? Cette question tourne en boucle dans la tête des skieurs qui grimpent depuis 1968 au sommet de la télécabine de La Croix à Chamrousse. L’appareil domine en partie l’Olympique hommes et offre un aperçu aux candidats à cette descente olympique, hissée au rang des dix plus belles pistes de l’arc alpin. Vu d’en haut, son tracé se révèle technique avec ses successions de murs, de bosses, de virages secs ou serrés. On est sur un domaine réservé « aux bagarreurs » racontent les pulls rouges à leurs futurs étoilés.

Sur les traces de Jean-Claude Killy

Pendant des années après les jeux, et encore aujourd’hui, Casserousse fait rêver. On vient de loin pour elle, pour découvrir cette légendaire piste où s’est illustré le plus grand skieur de l’Histoire, Jean-Claude Killy. La réponse tient en un mot. Palmarès. Ici et nulle part ailleurs au pied du massif de Belledonne, le Savoyard de Val d’Isère a, au cours de ces jeux d’hiver, enchaîné sans sourciller les trois courses majeures de la discipline, et signé là son plus grand chef-d’œuvre. La descente, l’épreuve reine,a tracé sa destinée. Mais s’est jouée à huit centième avec Guy Perillat, son compagnon et éternel second. Parti premier, il s’est vu champion olympique durant 14 minutes. Mais la fusée Killy lui raflait l’or et au passage celui du géant et du slalom. Un triplé gagnant. Du jamais vu. Et surtout jamais égalé depuis. C’était il y 57 ans à Chamrousse.

Alors pour remonter la pente du temps et la vivre au présent, il fallait un autre champion. Et qui mieux que Nano Pourtier ! L’ancien entraîneur en ski de bosses, bobsleigh et hockey est un Chamroussien pur souche. Sur des skis depuis près de 70 ans, il reste solide comme ces pins cembros centenaires qui mettent en relief cette descente. Il la connaît bien pour l’avoir ouverte ce 9 février 68.

Il avait 14 ans, et avec trois autres copains du club, il a permis aux télévisions de caler leurs caméras avant le passage des champions. Après les Jeux, Casserousse est resté longtemps le passage obligé de tous les gamins qui visaient des podiums. Nano n’a rien oublié de ce temps où il rêvait d’être un Killy. Une légende qu’il croise tous les ans depuis les Jeux de 92.

À Albertville quand l’un orchestrait les Jeux, l’autre parvenait à placer trois Français dans les quatre premiers en ski de bosses. En 2016, quand Nano Pourtier reçoit la légion d’honneur à Chamrousse des mains de son prodige, Edgar Grospiron, Jean-Claude est là au milieu des invités. C’est drôle, ils ont en commun une histoire de « triplé ».

Départ au sommet du domaine skiable à 2 250 mètres d’altitude

Allez on laisse les souvenirs dans la télécabine pour glisser vers la terrasse du restaurant de La Croix. Nano plante ses deux bâtons, plus ou moins là où se trouvait le départ à 2 250 mètres, le sommet du domaine skiable. Toutes les descentes olympiques partaient de là, «d’une cabane en bois à laquelle on avait accroché un lançoir spécialement construit pour permettre aux champions de prendre de la vitesse ».

Un monument historique qui a abrité durant 15 ans le poste de secours des pisteurs. Dans son bureau, le chef d’exploitation, Jean-Luc Jaouen, conserve précieusement le cliché. La cabane n’est plus. Le restaurant panoramique lui a volé la vedette. Par contre « les femmes, elles n’arrivaient pas à Casserousse mais dans la cuvette des Gaboureaux. D’ailleurs leur piste n’a guère changé, tout juste a-t-elle été un peu élargie ». Parce que l’olympique hommes, elle, file sur un autre versant, direction Casserousse, trois kilomètres plus bas. 2 850 mètres pour être précis. Et elle a bien changé depuis les jeux.

On se laisse alors porter par cette pente douce, un peu traître, avant le grand plongeon dans Casserousse. Et ce n’est pas qu’une impression. L’Olympique homme surplombe Grenoble. D’ailleurs d’en bas on voit bien l’antenne relais que les vacanciers confondent souvent avec la Croix plantée juste à côté.

Un horizon à 360° au cœur des Alpes

Ce fleuron noir et rouge du domaine skiable suspend les skieurs à un paysage à couper le souffle. Face à eux, sur 360 degrés, se dressent les sommets de l’Oisans, le Taillefer, un bout du Vercors avec le mont Aiguille et à son opposé la Chartreuse. À vous donner le vertige alors qu’il faut au contraire rester solide sur ses appuis. Le mur de Casserousse ne pardonne pas. À ne pas confondre avec le Grand situé plus haut, un ancien hors-piste, accessible depuis cet hiver par la passerelle himalayenne de la Croix et son mini-couloir non damé, les Soldanelles. Une variante de l’Olympique un peu plus engagée, qui prive par contre les puristes de Casserousse de ses deux bosses du Coq. Ici les têtes brûlées décollent sur 30 mètres avant le col de la Balme. Point de jonction des deux parcours.

Arrivent enfin le long virage en S et le très étroit passage Krieg. Un hors-piste avant le long schuss final. Depuis 2016, si la piste suit toujours le tracé de l’Olympique, elle a sérieusement été remodelée. Plus large, un peu moins raide sur certains passages, et rouge désormais à partir du col de Balme, Casserousse a eu droit à un coup de jeune vital pour la rendre plus accessible, mais plus aux normes de la FIS. Boudée des skieurs pour son manque de neige, la Régie a choisi de lui redonner son capital olympique avec un nouveau télésiège 6 places à la place des deux téléskis. Elle a surtout consolidé l’enneigement avec des canons.

Sur Casserousse, désormais, on varie désormais un peu plus les plaisirs. Plaisante et sportive à la fois, plus besoin d’être un champion pour s’offrir cette descente mythique à jamais olympique.

Article issu du Dauphiné Libéré

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