En arrivant sur le plateau de Nyon à Morzine, il suffit de tendre l’oreille et de lever les yeux pour profiter d’un spectacle unique. Comme depuis plusieurs années maintenant, les Aigles du Léman y ont pris leurs quartiers du 21 décembre au 30 mars. Sur place, aigles, chouettes, hiboux, pygargues, faucons et vautours assurent des spectacles et des diverses animations pour le plus grand plaisir des skieurs comme des non-skieurs. De quoi émerveiller les touristes.
Des activités gratuites
Parmi les activités gratuites proposées, il y a des spectacles de fauconnerie gratuits sur la terrasse du restaurant La Pointe de Nyon, le vol libre de l’aigle impérial Darshan depuis le sommet de la pointe et son fameux piqué en direct juste au-dessus de la terrasse du restaurant, une exposition sur le programme de réintroduction du pygargue à queue blanche et la “faucon gagne”, une course, skis aux pieds, contre un faucon gerfaut sur environ 1,5 km de descente. À la clef en cas de victoire contre le rapace : un stage de fauconnerie. « Si le faucon n’est pas décidé à descendre, vous avez une chance de gagner. Sinon, c’est très compliqué. Il peut voler à plus de 300 km/h », sourit Jacques-Olivier, fondateur des Aigles du Léman.
Il y a aussi des animations payantes comme une session de ski de 45 minutes (25 €, niveau 3e étoile minimum) avec un pygargue à queue blanche, plus grand aigle d’Europe, disparu il y a 130 ans mais en phase de réintroduction dans les Alpes, ou encore un stage de fauconnerie de 40 minutes (75 €, dès 12 ans) pour partir à la découverte des rapaces et de leur fauconnier et même en porter sur un gant.
« Montrer que la montagne, ce n’est pas que le ski »
Outre l’aspect divertissant de ces expériences, Jacques-Olivier Travers met aussi l’accent sur l’aspect pédagogique. Ainsi, les différentes activités sont quasiment toutes accompagnées de commentaires sur la biologie des rapaces, leur rôle dans l’écosystème et les efforts de conservation. « Toutes les expériences proposées sont différentes pour le public et pour nous. C’est l’occasion de mettre en valeurs nos oiseaux et leurs aptitudes. Ce qu’on recherche aussi en venant ici, c’est d’alerter les gens, de les informer et aussi de parler avec eux de les éduquer par rapport à cette faune exceptionnelle qui vit dans ces espaces montagnards », ajoute le papa des Aigles.
Installés à Sciez depuis 1997, les Aigles du Léman changent donc d’adresse l’hiver arrivant et filent à Morzine depuis 2019. C’est en tournant le documentaire Freedom, l’envol de l’aigle en 2012 que Jacques-Olivier Travers a eu cette idée de décliner les activités du parc durant l’hiver et s’est donc rapproché de la société des remontées mécaniques, gestionnaire du site, pour mettre en place un partenariat. L’occasion aussi de faire rentrer des fonds durant une période où le parc de Sciez est fermé, mais surtout partager cette passion autour de ces oiseaux qu’il chérit tant. « J’ai toujours aimé faire voler mes oiseaux en pleine nature, et pour eux c’est un endroit exceptionnel », conclut Jacques-Olivier Travers. « On veut vraiment montrer que la montagne, ce n’est pas que le ski. Mon but en venant à Morzine l’hiver est de transmettre cette passion aux visiteurs et de les inciter à protéger l’environnement. Au final, le public est ravi et les oiseaux aussi. »
Les Aigles du Léman mènent depuis 2022 un programme de réintroduction du plus grand aigle d’Europe , le pygargue à queue blanche, disparu en France depuis le milieu du XXe siècle. L’objectif du programme : relâcher 85 jeunes pygargues d’ici 2030. Chaque année, le parc accueille de nouvelles naissance s. Il est d’ailleurs possible de suivre la croissance de ces bébés pygargues via des caméras installées dans leur volière. Ce projet a germé dans la tête de Jacques-Olivier Travers, en 2007. Journaliste de formation, il se passionne dès le plus jeune âge pour cette espèce après l’avoir découvert dans un livre d’ornithologie. « J’ai tout de suite rêvé de le revoir dans le ciel de notre pays. La route a été longue car il y en avait très peu en captivité et le milieu naturaliste n’était pas très chaud pour entreprendre un programme de réintroduction », se souvient le fondateur des Aigles du Léman.
En 2009, le parc de Sciez a importé les premiers pygargues en provenance de Russie. Les premiers couples se sont formés en 2012, et le succès a été progressif : à partir de 2017, plusieurs couples se reproduisaient chaque année, avec l’aide de divers zoos en France et en Europe.
Cinq aiglons tués par l’homme
La méthode de réintroduction adoptée repose sur l’élevage des jeunes pygargues par leurs parents, ce qui réduit le stress lié à une séparation brusque. Un suivi scientifique a été mis en place, comprenant des analyses sur la survie des jeunes, la dynamique des populations et les cycles de vie, grâce à des balises GPS. Le projet implique dix couples, dont sept sont des reproducteurs sélectionnés pour préserver la diversité génétique. À court terme, l’objectif est d’assurer la survie des jeunes pygargues et d’observer leur adaptation. À long terme, le projet vise à établir une population viable et autonome, contribuant à la biodiversité et à la résilience des écosystèmes locaux.
Depuis le début de la réintroduction en 2022, 14 aiglons ont été relâchés dans la nature. Plusieurs dizaines d’autres devraient suivre d’ici 2030. Malheureusement, cinq aiglons ont déjà péri depuis qu’ils ont été relâchés dans la nature. Et tous à cause de l’homme (tirs, empoisonnements, accident…).
Article issu du Dauphiné Libéré