L’image est familière : une belle couche de neige recouvrant la montagne, puis la pluie qui s’invite et, en quelques heures, transforme le paysage en un manteau détrempé, voire en plaques de glace.
Pourtant, certains dans votre entourage pourraient vous affirmer que la pluie ne ferait pas fondre la neige, et qu’elle la tasserait seulement. Alors, cette idée paradoxale relève-t-elle du mythe ?
Un processus plus complexe qu’il n’y paraît
Intuitivement, on pourrait penser qu’une pluie abondante accélère la fonte de la neige. Après tout, l’eau est plus chaude que la neige, et en s’infiltrant, elle devrait la faire disparaître rapidement. Mais en réalité, le phénomène est bien plus subtil.
Lorsqu’une pluie tombe sur une couche de neige froide (inférieure à 0°C), l’eau liquide refroidit immédiatement et peut même geler au contact du manteau neigeux. Conséquence de quoi, une croûte plus dense se forme en surface, compactant la neige au lieu de la faire disparaître immédiatement.
Dans le cas où la température ambiante est légèrement positive, la pluie apporte de la chaleur à la neige, mais avant de la faire fondre, elle va d’abord la saturer en eau. Les flocons perdent alors leur structure cristalline et se tassent sous leur propre poids. Ce n’est qu’une fois que le manteau neigeux est déjà bien humidifié que la fonte devient significative.
Facteur clé : la température de l’air et du sol
Vous commencez à le comprendre, le rôle de la température ambiante est primordial :
- Si l’air est encore froid et que le sol est gelé, la pluie aura peu d’effet immédiat sur la neige, sauf à la durcir en surface.
- À l’inverse, si la température dépasse les 0°C et que la pluie est soutenue, l’eau accumule progressivement assez de chaleur pour déclencher la fonte.
Un autre paramètre joue un rôle essentiel : l’intensité et la durée des précipitations. Une pluie fine et éparse aura tendance à humidifier et à tasser la neige, tandis qu’une pluie prolongée et abondante finira par la dissoudre progressivement.
Une pluie froide (proche de 0°C) a moins d’effet sur la neige qu’un brouillard doux et humide. L’air chaud chargé d’humidité peut en effet accélérer la fonte par condensation, en libérant de la chaleur latente au contact du manteau neigeux
Quelles conséquences en montagne ?
En montagne, les épisodes pluvieux en plein hiver ne sont pas rares, notamment lors de redoux, phénomène que l’on constate en ce mois de janvier supposé être le cœur de l’hiver.
Cela modifie considérablement la qualité de la neige et peut impacter les conditions de ski. Une neige tassée et gorgée d’eau devient lourde et difficile à skier, tandis que si elle regèle ensuite, elle forme une croûte dure peu agréable sous les spatules.
Sur le plan de la sécurité, une pluie intense peut aussi jouer un rôle dans la stabilité du manteau neigeux. En humidifiant les couches profondes, elle peut soit favoriser leur cohésion temporaire, soit au contraire déclencher des avalanches, notamment sur des pentes où une couche fragile persiste en profondeur.
Alors, mythe ou réalité ?
Dire que la pluie ne fait que tasser la neige est à moitié vrai. Si la température est basse, la pluie peut effectivement compacter la neige en surface sans la faire fondre immédiatement. Mais dès que la douceur s’installe et que l’eau liquide s’accumule, la fonte devient inévitable. Tout dépend donc du contexte météo.
La prochaine fois qu’il pleut sur votre station préférée, observez bien la neige sous vos pieds : se tasse-t-elle ou disparaît-elle lentement ?