Pourquoi y a-t-il une chapelle seule au milieu du lac de Serre-Ponçon ?

Quand on découvre le lac de Serre-Ponçon pour la première fois, un détail attire immédiatement le regard : une petite chapelle, posée comme par miracle sur un îlot au milieu de l’eau. Cette image, à la fois poétique et mystérieuse, est devenue l’un des symboles les plus emblématiques des Hautes-Alpes.

Mais pourquoi une chapelle se trouve-t-elle ici, isolée au beau milieu d’un lac artificiel ? Est-ce un vestige d’un village englouti ? Une construction récente ? Une légende alpine ? Voici l’histoire vraie, et saisissante, de la chapelle Saint-Michel, gardienne de la mémoire d’une vallée disparue.

Une vallée sacrifiée pour maîtriser la Durance

Le lac de Serre-Ponçon n’est pas un lac naturel. Il s’agit d’un vaste réservoir artificiel né d’un chantier colossal lancé dans les années 1950. À cette époque, la vallée de la Durance est régulièrement frappée par des crues dévastatrices, qui menacent les villages, les cultures et les infrastructures en aval jusqu’à la Provence.

L’État décide alors de construire un barrage hydroélectrique pour réguler le débit de la rivière et produire de l’électricité. Le projet est titanesque : le barrage de Serre-Ponçon deviendra l’un des plus grands de France, et son réservoir, l’un des plus vastes lacs artificiels d’Europe.

Mais cette prouesse technique a un prix : plusieurs villages, dont Savines et Ubaye, doivent être détruits et engloutis. Plus de 1 500 habitants sont expropriés, leurs maisons rasées, leurs terres noyées.

La chapelle Saint-Michel, seule rescapée d’un monde englouti

Parmi les édifices promis à la disparition, une petite chapelle romane du XIIe siècle attire l’attention : la chapelle Saint-Michel de Savines. Isolée sur une butte rocheuse dominant la vallée, elle se trouve dans la zone qui sera submergée par les eaux.

Alors que les bulldozers détruisent les villages alentours, une mobilisation locale s’organise pour tenter de préserver ce petit joyau du patrimoine religieux. Grâce à son emplacement surélevé, les ingénieurs choisissent finalement de l’épargner. Ils renforcent la butte, la consolident, et décident de laisser la chapelle en place.

Lorsque le barrage est mis en eau en 1961, les flots montent et transforment la colline en un minuscule îlot. La chapelle devient inaccessible, cernée par le lac, figée dans le silence.

Le saviez-vous ?
  • Le lac de Serre-Ponçon s’étend sur 28 km², à la frontière entre les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence.
  • Le village de Savines a été reconstruit sur les hauteurs et s’appelle désormais Savines-le-Lac.
  • Le barrage mesure 123 mètres de haut et peut contenir jusqu’à 1,2 milliard de m³ d’eau.

Une icône du lac de Serre-Ponçon

Aujourd’hui, la chapelle Saint-Michel est bien plus qu’un monument religieux. Elle est devenue un repère visuel, une carte postale vivante, une icône du tourisme dans les Hautes-Alpes. Visible depuis la plage de Saint-Michel, elle attire les curieux, les photographes et les promeneurs tout au long de l’année.

Parfois, lorsque le niveau du lac baisse, notamment en hiver ou lors des travaux d’entretien du barrage, l’îlot se dévoile davantage, et les promeneurs peuvent s’en approcher à pied.

Mais la chapelle ne se visite pas. Elle est fermée au public pour des raisons de sécurité et de conservation. Ce mystère contribue à sa légende.

Un symbole de mémoire et de résilience

Sous les eaux calmes du lac de Serre-Ponçon dorment encore les ruines de maisons, les fondations d’églises, les vergers et les sentiers d’antan. La chapelle Saint-Michel est la seule survivante visible de cet ancien monde.

Elle incarne la mémoire d’un territoire transformé au nom du progrès. Sa présence solitaire rappelle que derrière chaque grande infrastructure, il y a aussi des sacrifices humains, culturels et patrimoniaux.

Comment voir la chapelle Saint-Michel aujourd’hui ?

Pour admirer la chapelle Saint-Michel de Serre-Ponçon, plusieurs options s’offrent à vous :

  • Depuis la plage de Saint-Michel (commune de Prunières) : le point de vue le plus proche.
  • En paddle ou en kayak : l’approche en douceur permet de s’en approcher sans la perturber.
  • Depuis les airs : certaines excursions en parapente ou ULM permettent de la contempler vue du ciel.
  • Depuis les hauteurs : les belvédères de Réallon ou Savines-le-Lac offrent des panoramas spectaculaires.

 

La chapelle Saint-Michel, seule au milieu du lac, est bien plus qu’une curiosité touristique : c’est un témoin silencieux de l’histoire de la région, du combat entre nature et modernité, et de la mémoire des habitants déplacés. Elle continue de fasciner, d’interroger, et de faire battre le cœur de la vallée, un demi-siècle après la montée des eaux.

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