Le rapport scientifique de la Commission internationale de protection des eaux du Léman (Cipel) publié le 14 janvier montre un lac qui contient peu de phosphore ou de pesticides, mais des microplastiques, et dont la biologie est mise sous pression par le réchauffement.
+1,1 degré dans les eaux profondes en 11 ans
Les eaux de surface ont été chaudes en 2023, date de la campagne de mesures, avec 13,6 degrés en moyenne entre 0 et 10 mètres. Dans la couche d’eau profonde, la température est passée de 5,1 degrés en 2012 à 6,2 en 2023. Ce 1,1 degré de hausse en 11 ans s’explique principalement par l’absence de brassage hivernal complet depuis 2012. Résultat : « Des niveaux d’oxygène inquiétants dans les zones profondes du lac. » Et un changement dans “la nourriture” du lac. « Le phytoplancton a connu un pic précoce, tandis que les populations de zooplancton, essentielles à la chaîne alimentaire, poursuivent leur déclin. »
Changement pour la faune
Pour les corégones et les féras, les deux poissons emblématiques du lac, qui font aussi vivre les pêcheurs, le réchauffement est donc une pression. « En 2023, la reproduction des perches a été décalée en profondeur avec l’essentiel des pontes à 20 mètres, et est plus précoce qu’en 2022, malgré des températures moins élevées et la présence de perches de plus grande taille. Des investigations supplémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre les raisons des changements observés » indique la Cipel.
Quant à la moule quagga, invasive présente dans le lac depuis 2015, des relevés ont montré qu’elle pouvait « coloniser des profondeurs allant jusqu’à 250 mètres, avec une concentration maximale entre 10 et 50 mètres, là où les conditions de température et d’oxygène sont les plus favorables. »
Phosphore, proche de l’objectif
Le phosphore est un combat historique de la Cipel et le précédent objectif, fixé en 2011 de 10 à 15 µg/l est désormais très proche d’être atteint. Le changement de composition des lessives sur une longue période, autant que le progrès des stations d’épuration explique cette valeur de 16,2 µg/l atteinte. La Cipel prévient qu’il ne faudrait pas descendre en dessous de 10, sous peine de ne pas « maintenir des populations piscicoles fortes. »
Pesticides et médicaments : pas de dépassements
Les teneurs en résidus médicamenteux, pesticides et en métaux dans le Léman répondent aux exigences légales pour l’environnement et l’eau potable. « Sur 135 pesticides recherchés, un maximum de 20 substances sont quantifiées », mais sans dépassements. Les mesures sont pourtant fines. Elles ont même mis en évidence des fongicides dans le delta de la Dranse, notamment le thiabendazole, « traduisant une utilisation plus marquée dans cette région. » De la même façon, dans la baie de Vidy près de Lausanne, la concentration en ibuprofène est un peu supérieure. Mais ces substances relevées en très petites quantités près des rejets d’eaux usées se dispersent ensuite facilement.
Plastique, pas fantastique
Concernant les macroplastiques une moyenne de 3,4 éléments plastiques par mètre linéaire a été répertoriée, « les plus courants étant les emballages de nourriture, les mégots de cigarettes et les pellets industriels », mais aussi des fibres utilisées pour améliorer la cohésion du béton projeté. C’est surtout le microplastique qui inquiète, avec un triplement en 10 ans.
Une moyenne de 17 500 fragments par mètre carré a été retrouvée sur les plages du Léman dont 75 % de fibres textiles. Comme on l’avait dit lorsque l’on avait évoqué l’étude menée en partenariat avec l’Association de Sauvegarde du Léman (ASL), la répartition semble un peu aléatoire, « à part les plages du Bouveret et des Grangettes qui subissent l’influence du Rhône et des contre-courants. »
Article issu du Dauphiné Libéré