La brume matinale recouvre encore la plaine où Mathilde, 32 ans, s’active pour brosser et seller son cheval. L’impassible Nuage, cheval « tout-terrain » de 26 ans, broute sans se soucier des évènements qui l’entourent. Son calme et sa docilité parsèment des indices sur sa carrière de randonneur chevronné.
Le duo a participé à de nombreux défis de trek, une compétition équestre qui rassemble les amateurs de rando et d’orientation : « Une fois on a gagné une course de plus de 100 kilomètres, de nuit », se remémore Mathilde en flattant l’encolure de l’équidé.
700 km d’itinéraire tracés à travers les Hautes-Alpes
Cette passion qu’elle partage avec Nuage le petit cheval pie, Mathilde Hervé y dévoue la majeure partie de son temps. Devenue présidente du comité départemental du tourisme équestre il y a quatre ans, c’est elle qui se charge de développer de nouveaux sentiers balisés dans la région.
Depuis une dizaine d’années, 700 km d’itinéraire ont été tracés à travers le Queyras, le Champsaur, la Route Napoléon, le Dévoluy, la plaine de la Vance et une majeure partie du lac de Serre-Ponçon. « Et on essaye d’en créer un dans le Briançonnais, de Montgenèvre à Gap », termine Mathilde.
Mais la mission n’a rien d’évident, car la Fédération Française d’Équitation ne propose pas de classement des sentiers par niveau : « Quand on repère un chemin et qu’on veut le proposer, on doit d’abord s’assurer qu’il soit sécurisé pour tous les cavaliers et tous les chevaux », détaille Mathilde, qui ajoute avec un brin de déception : « Il y a des endroits très beaux, mais on sait que pour des personnes sans expérience de la montagne ça serait trop compliqué. »
Puis, il faut convaincre les communes de s’engager sur l’entretien des sentiers, et de financer le balisage : « environ 40 euros par kilomètre », estime la présidente. La démarche ne s’arrête pas là : il faut aller baliser, à pied, armé d’un pinceau et d’un seau de peinture orange : « On fait ça par groupe de deux répartis par tronçons de 8 km », précise Mathilde.
« Le deuxième sport encadré du département »
La mission du comité ne s’arrête pas là, puisqu’ils supervisent le bon état des sentiers toute l’année, en se tenant à disposition des randonneurs qui cherchent un conseil éclairé. Est-ce que les efforts de la CDTE, dont la plupart des baliseurs sont bénévoles, portent leurs fruits et attirent toujours plus de cavaliers dans la région ? Difficile à dire : « Nous n’avons aucun moyen de les compter, et de toute façon ça reste assez niche », déplore Mathilde Hervé qui souligne que ce manque de données est préjudiciable quand il faut négocier l’aménagement d’une voie avec les mairies.
« Par contre sur les sorties encadrées proposées par les centres équestres, on sait que c’est le deuxième sport encadré du département », annonce-t-elle fièrement.
Un hébergement dans l’esprit de la randonnée
D’un bond souple, Mathilde se hisse sur le dos de Nuage, et ordonne le départ au pas, tout en légèreté. Derrière elle, son amie Gabrielle Astier, 32 ans, chevauche Kadouna, une jument tranquille de 23 ans. Les deux amies sont habituées des randos, et connaissent bien les petites astuces qui les rendent plus agréables : bien regarder la météo, connaître sa condition physique et celle de son cheval, se renseigner sur les comportements à adopter en face des chiens de protection…
Et penser à se loger : « On trouve un gîte qui se propose d’accueillir les cavaliers et leur cheval tous les 20 km sur nos itinéraires », raconte Mathilde Hervé. L’hébergement reste dans l’esprit de la rando : pour une dizaine d’euros en plus, le cavalier dispose d’un paddock pour sa monture, avec une ration de foin et un espace sécurisé pour ranger le matériel : « C’est sûr qu’il ne faut pas s’attendre à un grand luxe », plaisante Gabrielle Astier.
Article issu du Dauphiné Libéré
