D’en bas, le parcours reste discret. Presque invisible, comme fondu dans le paysage. Seules se remarquent les silhouettes qui évoluent sur la paroi, se hissent en haut de la falaise et traversent, via des passerelles, le gouffre où s’écoule l’Ardèche. « La vue est incroyable », lâche, dans un souffle, le jeune Luka.
« Ça fait des années qu’on en entend parler »
Originaire du Nord, le garçon est venu pratiquer sa première via ferrata avec son père. Celle qui surplombe le Pont du Diable et fait face au village de Thueyts, lui-même niché sur une coulée basaltique.
« Ça fait des années qu’on en entend parler et que j’ai envie de l’y amener, raconte Simon Holt. J’en ai fait une fois dans les Vosges, il fallait qu’il essaye ça. »
Un parcours en plusieurs étapes
En cet après-midi de juillet, la pierre est chaude sans être bouillante. Le soleil tape sur les muscles tendus, les mâchoires se serrent sous l’effort. Les deux progressent grâce aux barreaux plantés dans la roche. Luka se révèle étonnant du haut de ses 14 ans.
« La rive gauche, la première, fait office de phase de test, explique Vinciane Teston, responsable du snack et point de location d’équipement. Ça permet de se rendre compte de ses capacités avant de rejoindre la rive droite, légèrement plus difficile. »
Dépasser le vertige
Une première échappatoire est possible entre le pont népalais, illustré par un simple câble tendu au-dessus du vide, et la tyrolienne longue de 90 mètres.
La seconde échappatoire se situe sur le versant ouest. De l’autre côté de la rivière, dans laquelle les baigneurs profitent de la fraîcheur de l’eau. Père et fils ignorent la sortie et poursuivent leur ascension, direction le belvédère, qui culmine à 100 mètres par rapport au lit de l’Ardèche.
Si le panorama mérite bien des arrêts, c’est la chaleur qui pousse le duo à faire des pauses, ponctuées par le bruit des plongeons effectués en contrebas. « Après la via, baignade ? » suggère Luka. Le père acquiesce, reprend son souffle. Le lendemain promet de belles courbatures. Les deux sont là pour le défi sportif et le « dépassement de soi ».
Jouer avec ses limites
« Ce qui est bien, c’est que l’on joue avec ses limites, reconnaissent Boris et Céline à leur retour du parcours. La difficulté croissante permet de s’habituer au vide, mais le stress est toujours là. »
Yannick, lui, a le mérite d’avoir essayé. Lancé sur la via ferrata, le quadragénaire a rapidement dû faire demi-tour. « Mes jambes ont commencé à trembler. Je me suis dit : ça ne sert à rien d’aller plus loin si c’est pour se retrouver bloqué là. »
La chute peut très vite être accidentogène
« La via ferrata n’est pas sans risque, souligne François Laupin, guide depuis 12 ans sur le territoire. Elle peut paraître facile, accessible, mais la chute peut très vite être accidentogène. »
Le matériel ne doit pas être pris à la légère : casque, baudrier, poulie et longes avec absorbeur d’énergie sont essentiels. « Pour débuter, la via corda peut être un bon compromis, avec des parcours adaptés. » Il en existe plusieurs en Ardèche. Mais la via ferrata est, elle, plus réglementée.
Celle de Thueyts, par ailleurs communale, fait l’objet d’une surveillance assidue. « Il y a tout un tas de normes à respecter, comme le diamètre du câble et l’espacement des ancrages. »
« C’est un lieu emblématique du coin »
En ce début de saison, l’activité attire environ 70 personnes par jour. Mais le pic de fréquentation peut atteindre 120 passages quotidiens au plus fort de l’été. « Le lieu joue aussi : on est sur l’un des plus gros sites de baignade d’Ardèche, poursuit le guide. C’est un lieu emblématique du coin. »
En bas, sur la plage de rochers et tout au long des 200 mètres de baignade, personne ne lui donne tort. « La via ferrata ? On laisse ça aux courageux », sourit un jeune couple venu de Belgique. « On l’a faite il y a quelques jours », balayent deux amis qui cherchent à rejoindre un spot de plongée.
Et d’ajouter, juste avant de sauter dans l’eau turquoise, produisant un son douloureusement attirant pour les derniers grimpeurs attachés à la paroi : « Cette fois, on a prévu des maillots de bain. »
▶ Ouverte tous les jours de 10 à 19 h, jusqu’à fin septembre.
▶ Parcours accessible à tous à partir de 45 kg et 1,40 m, à condition d’avoir une bonne condition physique et de ne pas être sujet au vertige. Itinéraire en autonomie totale, présence d’un guide ou d’un moniteur est recommandée pour les débutants.
▶ Attention à disposer du matériel adéquat (bonnes chaussures, casque, baudrier, longes, poulie…) et savoir l’utiliser.
▶ Le parcours dure environ 2 h. Depuis le parking, environ 10 minutes de marche d’approche. Présence d’un pont népalais, d’une tyrolienne et d’une passerelle. Deux échappatoires prévues avant et après la tyrolienne, longue de 90 m. Difficulté AD + (assez difficile +). Longueur de l’itinéraire : 490 m pour un dénivelé de 100 m. 5 € l’entrée sans matériel, 16 € par équipement loué (avec droit d’entrée inclus). Parking gratuit. Pour plus d’infos, appeler le snack du Pont du Diable qui fait office de point de location : 06 42 35 43 23.
Article issu du Dauphiné Libéré