En 2006 la flamme olympique est passée en Italie à travers montagne

Ce 6 février 2006, on est à trois jours de l’ouverture de l’événement à Turin. Chamonix, historique capitale des jeux d’hiver depuis 1924, retrouve, le temps d’une soirée, la ferveur olympique. La flamme arrive d’un périple qui l’a conduite de Grenoble à Albertville, souvenir de 1968 et 1992, avant de remonter les gorges de l’Arly. Terminus, le pied du mont Blanc. Trois illustres champions du cru traversent la ville en portant le flambeau devant 5000 personnes. Il y a là Karine Ruby, d’Argentière, première championne olympique de snowboard à Nagano en 1998, et les vétérans Guy Périllat, double champion du monde de ski alpin, et Gilbert Poirot qui a dédié sa vie au saut à ski.

La soirée est belle mais demeure un détail. Comment la flamme va-t-elle franchir les Alpes pour arriver dans le Piémont à temps ? Initialement, des esprits trop cartésiens avaient songé à la route et au tunnel du Mont-Blanc, long de 11,6 km qui relie la Haute-Savoie au Val d’Aoste. Mauvais goût mis à part, la symbolique aurait vacillé.

Les guides de haute montagne prennent le lead

Aussi les deux plus vieilles compagnies de guides de haute montagne au monde, celle de Chamonix, créée en 1821, et sa jumelle de Courmayeur, versant italien du massif du Mont-Blanc, avaient-elles pris les devants, offrant leurs services. Il s’agissait de donner au flambeau la hauteur qui lui convenait, pour côtoyer le feu sacré que les alpinistes vont chercher en altitude. Une fois les cérémonies et le protocole clôturés dans la vallée, la flamme était sagement capturée pour être rangée dans une lanterne afin de la préserver des éléments, le temps d’une parenthèse nocturne vers les sommets.

« En cas d’accident, nous étions responsables ! »

Sur les coups de 21 h 30, le cortège de solides montagnards, pour moitié italiens, pour moitié français, remontait depuis le domaine skiable des Planards, à 1 000 m d’altitude, en direction de la mer de Glace, éclairés par leur lampe frontale, les skis chaussés des peaux de phoque. Xavier Chappaz, alors présidents des guides chamoniards, a conservé un souvenir ému du moment. « Un dirigeant de l’organisation olympique m’avait demandé les noms des porteurs. Je lui avais répondu qu’on était un collectif, une cordée, qu’il n’y avait pas d’identité à donner ». Et de s’amuser : « On n’avait pas ressenti de pression particulière à l’époque, même si on nous avait signifié qu’en cas d’accident, nous étions responsables ! »

L’expédition prenait ensuite la direction le refuge du Requin à 2500 m d’altitude, au cœur de la vallée Blanche, pour une courte nuit. Mais juste avant d’atteindre l’abri, entre vent et raréfaction de l’oxygène, c’est là qu’un fâcheux incident, jamais révélé jusque-là, s’est produit  : la flamme sacrée, allumée à Olympie en Grèce, perdait de sa vigueur. Jusqu’à… S’éteindre ! Un sacrilège vite réparé par les montagnards habiles et bricoleurs, se souviennent deux des guides chamoniards membres de l’expédition, Eric Favret et Yann Delevaux. L’incident pointe ainsi la difficulté de conserver la flamme en haute montagne.

Les torches passent de mains en mains dans la descente du glacier de Toule. Gare à ne pas faire tomber la flamme dans une crevasse. Photo Le DL /Antoine Chandellier
Les torches passent de mains en mains dans la descente du glacier de Toule. Gare à ne pas faire tomber la flamme dans une crevasse. Photo Le DL /Antoine Chandellier

Comment garder la flamme si haut ?

Deux ans plus tard, le 8 mai 2008, à la veille des Jeux d’été de Pékin, des alpinistes chinois hisseront la flamme au sommet de l’Everest (8 848 m), mais grâce à une torche spécialement conçue pour haute altitude, aucune combustion naturelle n‘étant possible à celle du toit du monde, utilisant différents mélanges gazeux, avec apport interne d’oxygène. Mais revenons à nos alpins. Le lendemain matin, Français et Italiens reprenaient la voie du glacier du Géant dès 7 heures et rejoignaient leurs compagnons vers 10 heures au col de Toule à 3 400 m, à la frontière franco-italienne où Xavier Chappaz et son homologue de Courmayeur se donnaient l’accolade.

L’été suivant, les guides de Chamonix remettaient, lors de leur fête du 15 août, une torche gardée en souvenir, à la star française de ces jeux de Turin : le Haut-Savoyard de la vallée d’à côté, Antoine Dénériaz, qui a décroché l’or dans la descente de Sestrières. Photo Le DL /Greg Yetchmeniza
L’été suivant, les guides de Chamonix remettaient, lors de leur fête du 15 août, une torche gardée en souvenir, à la star française de ces jeux de Turin : le Haut-Savoyard de la vallée d’à côté, Antoine Dénériaz, qui a décroché l’or dans la descente de Sestrières. Photo Le DL /Greg Yetchmeniza

La torche de retour à Chamonix

La flamme sortait alors de sa lanterne pour retrouver la torche profilée par Pininfarina. Plusieurs torches en fait qui s‘échangeaient de mains en mains, parmi les quelque 50 membres du cortège, composé aussi de gendarmes secouristes, au fil d’une longue descente sur les glaciers transalpins, naviguant entre crevasses et séracs. La flamme empruntait un itinéraire hors-piste alors classique mais qui, aujourd’hui, en raison de la fonte glaciaire et du dégel du permafrost, n’est plus guère couru, 18 ans plus tard.

En début d’après-midi, les skieurs gagnaient la vallée, de l’autre côté de la chaîne alpine. Au hameau de la Palud, à Courmayeur, devant un podium garni d’officiels du cru, un groupe folklorique valdôtain les attendait au garde à vous. Et le protocole reprenait ses droits.

Six mois plus tard, la torche de Pininfarina refaisait son apparition sur le parvis de l‘église de Chamonix. En souvenir et, remerciée par les instances olympiques pour sa participation, la Compagnie des guides avait conservé un exemplaire. Et tout naturellement pour sa traditionnelle fête du 15 août, elle le remettait à son invité du jour. Un certain Antoine Dénériaz qui, lors de ces jeux de Turin, avait décroché l’or olympique dans la descente de Sestrières.

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