Les secouristes italiens tous bénévoles : « Une loi justifie de quitter le travail pour un secours »

Le peloton de gendarmerie de haute montagne de Briançon a organisé un exercice d’ampleur dans la vallée Etroite, à proximité du refuge Terzo alpini, à Névache, au début du mois de juin. Il avait pour but de travailler avec les secouristes italiens, comme cela peut arriver lors de vrais accidents.

Quand on marche sur une arête, il se peut qu’un pied avance sur le territoire français, l’autre sur le territoire italien. Si l’image peut paraître décalée, dans les faits, la question peut se poser : en cas d’accident à la frontière, qui intervient ? Les secours français, ou les secours italiens du Piémont ? Plusieurs secteurs sont à cheval sur les deux pays, dans le nord des Hautes-Alpes : la frontière de Montgenèvre, le mont Viso dans le Queyras, la vallée Étroite à Névache.

« Nous avons souvent l’occasion de travailler ensemble »

C’est dans ce dernier secteur que le peloton de gendarmerie de haute montagne (PGHM) de Briançon a organisé, le 5 juin dernier, un exercice en collaboration avec les secouristes italiens : le Soccorso alpino et speleologico piemonte et la Guardia di finanza, une formation militaire. À la baguette, le chef d’escadron Pierre-Marie Dupré, commandant le PGHM de Briançon, et le major Laurent Arnaud, secouriste. L’événement se tenait à proximité du refuge Terzo alpini, à Névache, avec des exercices terrestres et héliportés : trois machines, une française et deux italiennes étaient présentes.

« Nous avons souvent l’occasion de travailler ensemble, on peut être amenés à mixer les équipes, apprendre les uns des autres », explique le major Laurent Arnaud. Du côté des Français, l’équipe qui monte dans l’hélicoptère est composée de deux secouristes, du PGHM de Briançon ou de la CRS Alpes de Briançon selon la semaine, du pilote et du mécanicien treuilliste. « En fonction de l’alerte, on prend un médecin ou pas : quand les blessures sont graves ou quand on part loin à l’autre bout du département, par exemple », détaille le major Jean-Nicolas Louis, secouriste au PGHM de Briançon.

« Il y a des bénévoles qui sont formés par des guides instructeurs »

Le secours italien peut être amené à venir en aide à une victime située à cheval entre la France et l’Italie. « Si les Italiens sont perturbés par la nebbia (le brouillard, NDLR), ils peuvent nous demander d’intervenir. C’est souvent plus souvent bâché (couvert, NDLR) chez eux que chez nous. Leur hélicoptère est basé à Turin. Il peut aussi arriver qu’on envoie des équipes terrestres françaises et italiennes, car, à l’alerte, les données ne sont pas assez précises », poursuit le major Jean-Nicolas Louis.

Contrairement aux secouristes français, les Italiens du Soccorso alpino sont des bénévoles. Emanuele Foglia est à la fois guide de haute montagne, mais aussi bénévole secouriste en montagne à Suse et technicien hélicoptère, il peut manœuvrer en paroi, par exemple. « Il y a des bénévoles qui sont formés par des guides instructeurs. On forme aussi les personnels des stations. » L’école de secours régionale du Piémont compte 15 formateurs.

En Italie, les hélicoptères sont basés sur quatre sites : Turin, Cuneo, Alessandria et Borgosesia. « Ces hélistations permettent de couvrir un territoire sans être à plus de 20 minutes de vol », précise Nicoletta Bergero, anesthésiste à l’hôpital de Briançon et spécialisée en secours en montagne. Dans l’hélicoptère italien, on compte un pilote, un mécanicien-treuilliste, un secouriste, un médecin, un infirmier. « Les secouristes italiens sont techniquement très bien formés, ils suivent un parcours. Il y a plusieurs spécialisations comme technicien de manœuvre en paroi, maître-chien, pilote de drone, spéléologue…, tous des bénévoles. »

« Il faut que le patron soit d’accord, c’est ça la chose la plus difficile »

En 2024, ils étaient 1 180 secouristes italiens bénévoles dans le Piémont. « Nous sommes à disposition 24 heures sur 24, 356 jours par an. Quand on nous appelle, on décide si on y va ou non », témoigne Cristina Alpe, responsable de XIII delegazione valle di Susa e Val Sangone. Le fonctionnement est assez similaire aux sapeurs-pompiers volontaires français. « Il faut que le patron soit d’accord, c’est ça la chose la plus difficile. Mais une loi justifie de quitter le travail pour un secours, et elle permet aussi une petite compensation financière. »

Les secouristes en montagne travaillent aussi avec des médecins via une convention. « Ils font cela bénévolement en plus de leur travail », précise Cristina Alpe. Carlo Massara est l’un d’entre eux. Il est spécialiste néphrologue, il dirige un centre près de Turin. « J’ai passé mon enfance à Bardonecchia et je fais partie du groupe de secours. Mais je m’occupe surtout de la formation des bénévoles. On a un réseau sanitaire régional de 80 médecins et infirmiers dans le Piémont. Parfois, la première équipe qui arrive sur la victime n’a pas de médecin ni d’infirmier. C’est pour ça que, depuis quelques années, on fait un gros travail pour que les bénévoles soient aptes à donner les premiers secours. Il existe un diplôme semblable à celui de la Croix-Rouge, avec des choses typiques de la montagne à connaître comme comment agir en cas d’avalanche, d’hypothermie, de foudre. »

Article issu du Dauphiné Libéré

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