Sur la lancée des 110 millions d’euros injectés sur le domaine skiable depuis la jonction entre les secteurs de Val-Cenis et Termignon et la création de la Société d’économie mixte (Sem) de Val-Cenis en 2007, une nouvelle étape se profile dans les deux ans à venir pour la station de Haute Maurienne (125 km de pistes). Des investissements de modernisation et diversification à hauteur de 25 M€ d’ici 2026, grâce aux bons résultats de la Sem.
« Nous n’arrêtions pas de revoir le plan prévisionnel d’investissement, après le Covid, la crise énergétique, l’inflation, les taux d’intérêt…, mais là, c’est à la hausse avec une capacité d’investissement accrue », reconnaît Yves Dimier, directeur d’une station sur la pente ascendante.
Après un dernier hiver record (735 000 journées skieurs et 18,5 M€ de chiffre d’affaires), la Sem est sur la base de 750 000 journées skieurs et 20 M€. Avec 23 700 lits (600 de plus cet hiver) et une clientèle étrangère passée de 19 à près de 25 % (plus de Belges et d’Anglais cette année), la base est solide. « Nos clients viennent à la montagne », souligne Yves Dimier. « La station, outil économique au service des habitants, occupe 0,5 % des 41 000 hectares de la commune (la deuxième plus étendue de France), dont 57 % sont en zone protégée », abonde le maire, Jacques Arnoux.
« Faciliter l’exploitation en mode piéton, été comme hiver »
Pour rester une destination attractive, la station mise sur le ski mais aussi son environnement, et une offre plus variée au-delà de l’hiver. « La modernisation du télésiège de la Girarde et la reconstruction de celui des Roches Blanches visent à l’amélioration du secteur de Termignon (NDLR : première porte d’entrée du domaine skiable à 25 minutes de la gare de Modane) et son offre complète : restauration, vue imprenable sur la Dent Parrachée et les glaciers de la Vanoise, boardercross, pistes variées en altitude… », insiste Olivier de Simone, président de la Sem, avec comme fil conducteur « faciliter l’exploitation en mode piéton, été comme hiver ».
Le remplacement des téléskis du Lac et du Grand Coin par un télésiège débrayable (pour permettre aux débutants de profiter du haut des pistes à 2 465 m d’altitude et, l’été, ouvrir le secteur aux randonneurs et VTT), un travail sur les pistes (Flambeau élargie, Cugne corrigée, et les Alpins, nouvelle liaison avec le secteur de Lanslebourg, créée), un cheminement innovant à la cime des arbres du Replat des Canons suivront, tout comme l’adaptation en télécombi du télésiège de la Ramasse, et la création d’une piste bleue panoramique au-dessus du Mont-Cenis sur Lanslebourg. Autant d’aménagements soumis à enquête publique au printemps 2024.
« Il est de notre responsabilité de porter des projets utiles à un tourisme durable et accessible en été et sur les ailes de saison ». Président de la Sem de Val-Cenis, Olivier de Simone assume la transition entre la saison hivernale et le reste de l’année.
La fréquentation hivernale et la glisse permettent de réinvestir pour l’activité touristique en général. « La fréquentation estivale, 15 % des recettes annuelles de la Sem, est en hausse », insiste le maire, Jacques Arnoux, louant le développement qualitatif du domaine skiable, qui vise à améliorer et « rendre attractive une grande partie de l’année une station de montagne. Nous avons des atouts à valoriser ». « L’activité est diversifiée, le tourisme développé sur toutes les saisons », salue le conseiller départemental Christian Grange.
Une passerelle à 2 100 m d’altitude Sur le secteur de Termignon, les nouvelles (et futures) remontées ont aussi été pensées pour les piétons et les VTT. Pour desservir une nouveauté d’ici quelques mois, le pendant de la canopée des cimes sur la Met : « Une approche innovante, une passerelle à la cime des arbres, dans la forêt du Replat des Canons (2 100 m d’altitude) pour découvrir d’autres points de vue sur la montagne environnante, et rendre la montagne plus accessible quels que soient l’âge et le niveau physique », souligne Olivier de Simone. Au départ de Lanslebourg, le télésiège de la Ramasse va être adapté en “télécombi” (alternance de sièges et de cabines). « Pour les skieurs et les piétons l’hiver, la randonnée et le VTT l’été, et aussi offrir une alternative à la voiture vers le secteur du Mont-Cenis ». Un “ascenseur valléen” à la sauce haut-mauriennaise. Sur le lac du Mont-Cenis, la base nautique, créée en 1989 et propriété de la Sem de Val-Cenis depuis 2024 , va être dotée avant l’été d’un ponton mobile (30 000 €) afin de faciliter l’accès des pratiquants. L’été dernier, 3 000 personnes ont profité des locations des 6 pédalos et 10 kayaks à 1974 m d’altitude.
Enfin, à moyens termes, la réflexion est engagée pour doter Termignon d’une télécabine et le fort de la Turra d’un téléphérique (mais interdit aux skieurs).
« Il y aura encore du ski durant quelques décennies à Val-Cenis »
« Nous avons renoncé à l’extension sur le vallon de Cléry (qui figurait dans l’UTN de la Turra) pour conforter et améliorer le domaine skiable », précise Yves Dimier. Le futur renforcement du réseau de neige de culture « se fera à prélèvement constant. Il faudra produire mieux, faire des choix ». « Le changement climatique est une réalité, on est obligé de s’adapter », ajoute le maire, Jacques Arnoux. « Il y aura encore du ski durant quelques décennies à Val-Cenis, comme le démontre l’étude ClimSnow (NDLR : le domaine est essentiellement en versant nord). On doit faire en sorte que nos villages demeurent vivants et accueillants ».
Passage connu depuis plus de 5 000 ans, le Mont-Cenis et ses villages ont toujours su s’adapter aux pratiques de leur époque pour pouvoir vivre et travailler au pays. « La stratégie est réfléchie, durable et cohérente. Il est illusoire d’imaginer avec certitude d’avoir de la neige de mi-décembre à mi-avril. Il faut faire en sorte de pouvoir la rejoindre à plus de 2 000 m d’altitude », conclut le maire.
À l’image du télésiège reconditionné des Roches Blanches, qui arrive à 2 100 m et permet d’accéder à des pistes situées à plus de 400 m d’altitude au-dessus, sans neige de culture. Les randonneurs et VTT en profiteront aussi aux beaux jours. « Val-Cenis montre le chemin de ce qui doit être fait demain », estime la députée Émilie Bonnivard. « Consolider le produit neige, mais en être moins dépendant ».
Dimanche 15 juin, à l’occasion de la dernière étape du Critérium cycliste du Dauphiné entre Val-d’Arc et Val-Cenis, avec une arrivée finale sur le plateau du Mont-Cenis, la station donnera un avant-goût de la future destination d’“ascenseur valléen” qu’elle souhaite donner au télésiège de la Ramasse.
Si la météo est au rendez-vous, la remontée mécanique sera en effet ouverte pour acheminer les spectateurs jusqu’en aval du col et limiter le plus possible la montée de véhicules via la RD 1 006.
Article issu du Dauphiné Libéré