Les scientifiques se succèdent au Jardin alpin du Lautaret, la base avancée de plusieurs expériences, souvent liées à l’environnement. Une scientifique s’interroge actuellement sur la réaction d’une certaine plante, l’artemisia (de la famille du génépi). « Le jardin a une relation historique avec l’écologie, l’environnement. Mais il a une autre filiation historique : la physiologie des plantes », rappelle le directeur, Jean-Gabriel Valay.
Du génépi semé et développé
L’objectif est d’analyser comment elles vivent dans les conditions climatiques du secteur en termes de lumière, de températures, de sécheresse… « Il y a toujours eu des scientifiques qui se sont intéressés à ça », poursuit-il. « Ils s’interrogent, par exemple, sur comment le génépi supporte l’intensité lumineuse, assez forte ici, la neige, le froid… »
Florence Courtois est l’un d’eux. Elle est enseignante chercheuse au Laboratoire Physiologie cellulaire et végétale, à Grenoble, qui dépend de l’Université Grenoble Alpes. Du génépi a été semé et développé. Elle regarde comment il réagit, quelles sont les conséquences d’une forte accumulation de neige, par exemple, ou d’une absence de neige.
La plante est posée sous une tente noire, avec une caméra, et un envoi de lumière, un ordinateur monitoré, « pour apprécier la façon dont la plante induit le mécanisme de photoprotection, une sorte de crème solaire », décrit-elle. « La chlorophylle absorbe cette lumière et est capable de la retransmettre. Parce que les plantes sont fixées, elles sont hautement adaptables. J’étudie comment ces mécanismes de photoprotection se mettent en œuvre. Je fais des manipulations préparatoires. » Elle place également les plantes dans des conditions qu’elle contrôle, à savoir en laboratoire, en jouant sur la modification des paramètres.
Étudier l’adaptation des plantes au climat
« Le programme commencera réellement l’hiver prochain, quand les plantes seront sous la neige, et au printemps, quand on pourra analyser comment elles repartiront. » L’objectif final de ce programme est d’acquérir des connaissances supplémentaires sur l’adaptation des plantes.
L’équipe est composée d’une quinzaine de membres, dont certains travaillent également sur les modèles marins, les phytoplanctons, et étudient les micro-organismes dans le lac du Pontet. Au total, ce laboratoire emploie environ 100 personnes.
Elle crée un réchauffement artificiel et accéléré de 2 degrés, sur quelques mètres carrés, à 2400 mètres d’altitude. Le projet Warm est piloté par Sandra Lavorel, médaillée d’or CNRS (Centre national de la recherche scientifique) depuis 2023 et scientifique au Laboratoire d‘écologie alpine. Ce réchauffement artificiel est mené grâce à des serres en plexiglass.
Douze petits morceaux de prairies sont « enfermés » dans ces serres à 1900 mètres d’altitude, et douze autres à 2500, au pied du rif Blanc. « L’idée est de savoir ce que devient l’écosystème dans le cadre d’un changement climatique », explique Jean-Gabriel Valay, directeur du Jardin alpin du Lautaret.
« Si le nouveau programme Terra Forma, avec ses capteurs (lire par ailleurs), fait ses preuves, l’expérience Warm pourrait bénéficier de ces nouveaux outils », indique Jean-Gabriel Valay.
Le site accueille également le projet “ alpages volants” , depuis 2016, dont la coordinatrice est Tamara Münkemüller. Des parcelles sont échangées entre 1900 et 2500 mètres d’altitude, par la voie des airs. Des tonnes d’alpage sont transportées 500 mètres plus bas, où la température est plus élevée, avec trois degrés de plus. Ce qui représente en gros la montée du mercure attendue d’ici la fin du siècle.
Article issu du Dauphiné Libéré
