« Pour bouger un caillou dans un site classé, il faut une autorisation », explique le maire de Saint-Gervais, Jean-Marc Peillex. À 2 400 mètres d’altitude, au bout des 12,4 kilomètres de la voie du Tramway du Mont-Blanc, on fait bien plus que remuer des pierres. Pare blocs en béton, pont, murs de soutènement : un vaste chantier a débuté l’été dernier. Le chemin de fer est prolongé de 300 mètres pour organiser une arrivée à plat du train jusqu’au refuge du Nid d’Aigle existant.
« Avec le réchauffement climatique, on pense que ce joyau va prendre une nouvelle dimension », assure Martial Saddier. Ainsi entre la rénovation de la voie ferrée existante, l’achat de quatre nouvelles motrices livrées en 2022, le rachat du refuge et la modification du Nid d’Aigle, ce sont 120 millions d’euros d’argent public investis à Saint-Gervais pour ce site touristique. « Il faut voir cela sur 60 ans », précise le président du conseil départemental, lors de sa visite sur le chantier le 29 août dernier, alors qu’une vingtaine d’ouvriers travaillent six jours sur sept pendant cette période de beaux jours.
- Mise en service du Tramway du Mont-Blanc en 1909.
- Altitude de départ au Fayet : 580 mètres.
- Altitude d’arrivée : 2 372 mètres aujourd’hui, puis 2 405 mètres après prolongement de la voie (plus haut train à crémaillère de France).
- 1 heure de trajet avec 7 arrêts différents.
- 200 places par trains.
- 130 000 à 170 000 passages par an.
250 heures d’hélicoptère économisées
D’ici la fin de l’automne, il faut terminer le génie civil. Dans le prolongement du tunnel actuel d’arrivée, la galerie de béton réalisée par Benedetti Guelpa doit être achevée avant l’hiver. Trois murs de soutènement sont réalisés en Acrosols, sortent de structures métalliques grillagées. « Ce sont 250 heures d’hélicoptère économisées par rapport à des murs en béton et on gagne 30 % de temps », précise Julien Baud, dirigeant d’Accro BTP.
L’administration n’est pas bien loin pour contrôler les travaux. Le vendredi 13 septembre, l’architecte des Bâtiments de France et la Dreal viendront valider l’esthétisme des murs en pierres, qui vont recouvrir ces infrastructures lourdes. Visuellement, la voie ferrée sera ainsi entourée de parois en gabion, qui sont réalisées à la main au rythme de 10 mètres cubes par jour, avec les pierres du site concassés sur place. « Ça, cela ne se fait nulle part ailleurs » commente Mathieu Dechavanne de la Compagnie du Tramway du Mont-Blanc, commanditaire des travaux.
« On a atteint ensemble des niveaux très élevés sur la gestion environnementale d’un chantier »
Dans un espace restreint, chaque coup de pelle se fait à bon escient. Des plantes remarquables sont marquées en bordure de chantier, pour ne pas les détériorer. L’an dernier, des graines ont été prélevées au Nid d’Aigle et mises en culture à Saint-Pierre-en-Faucigny, avant de replanter cette année ces touffes d’herbes. « Pour moi, le maître mot de ce chantier, c’est la finesse. On a atteint ensemble [NDLR : entreprises, collectivités et État] des niveaux très élevés sur la gestion environnementale d’un chantier », garantit Mathieu Dechavanne.
Au rythme de deux à trois trains par jour pour monter les matériaux par ballastière, le chantier va encore prendre du temps. La voie ferrée ne sera posée qu’au printemps prochain, pour un début d’exploitation commerciale en début d’été 2025. La fréquentation ne sera pas encore à 150 000 visiteurs par an, puisque l’an prochain, seuls les alpinistes ayant une réservation en refuge pourront monter. En parallèle, il s’agira d’achever l’intégration paysagère des infrastructures. Ainsi le grand public continuera de s’arrêter durant au moins un an, au mont Lachat.
Le Département veut ensuite modifier le refuge du Nid d’Aigle. L’agrandissement, permettant d’accueillir les touristes et voyageurs du Tramway du Mont-Blanc, se fera sans réellement modifier les volumes extérieurs. « Ce sera une extension en sous-œuvre, sous la terrasse actuelle, pour ne pas avoir quelque chose très gros dans le site classé du mont Blanc », détaille Benoit Borrel, le chef des projets techniques de la Compagnie du Tramway du Mont-Blanc. Le planning de ce dernier volet du chantier du Nid d’Aigle n’est pas encore totalement connu. À terme, l’arrivée du Tramway du Mont-Blanc et l’accès au refuge seront de plain-pied.
Article issu du Dauphiné Libéré