Bauges, Chartreuse, Luberon… Où peut-on bivouaquer dans nos massifs ?

« C’est super le bivouac, il faut en profiter ! » Écogarde au sein du parc naturel régional du Vercors, Alan Fraschini ne cache pas son enthousiasme à l’égard de cette pratique en vogue. Lui-même, habitué à s’immerger en pleine nature depuis son enfance, en est un fervent adepte. « J’aime cet aspect simpliste et la déconnexion que cela m’apporte. C’est un besoin que j’ai pour mon équilibre », admet-il.

Pour son travail, il officie dans la partie nord du Vercors, entre les communes de Saint-Nizier-du-Moucherotte et Corrençon-en-Vercors. En plus de veiller à l’entretien des sentiers, il doit aussi aller à la rencontre des promeneurs, et notamment ceux qui ont prévu de planter leur tente pour la nuit.

« Ça se passe globalement bien, le bivouac ne pose pas de souci quand il est bien fait », décrit-il. « Mais il faut faire les choses en connaissance de cause. »

Ne pas confondre camping sauvage et bivouac

Ce discours tranche avec l’actualité de ces dernières années, qui ont vu les interdictions concernant le bivouac se multiplier. C’est le cas depuis 2022 en Chartreuse, où il est interdit de planter sa tente entre juillet et août. Une mesure similaire a été adoptée entre mai et fin octobre au lac Achard, en Belledonne, comme sur les secteurs des lacs Jovet et l’alpage de Plan Jovet en Haute-Savoie. Plusieurs arrêtés temporaires ont été pris par le passé dans le massif du Taillefer, en Isère, ou sur le Mont-Aiguille.

Dans le Vercors, Alan Fraschini le rappelle : « Le bivouac n’est pas interdit. Mais il faut expliquer aux gens que ce n’est pas du camping sauvage. » Une différence qui se matérialise par le nombre d’heures passées sur place. Là où le camping sauvage consiste à s’installer pour plusieurs jours sans démonter son habitacle, le bivouac est monté le soir et démonté le matin.

Photo Le DL/Martin Baudry
Photo Le DL/Martin Baudry

Cette distinction n’en est pas une aux yeux de la loi. Les restrictions sont les mêmes : interdiction de s’installer sur une voie publique, sur un terrain privé sans l’accord du propriétaire, sur les rivages des mers, à proximité des monuments historiques ainsi qu’à moins de 200 mètres d’un captage d’eau potable. Mais, de fait, l’écart existe bel et bien. Le camping sauvage est interdit dans de nombreux sites naturels classés et un certain nombre de communes qui tolèrent le bivouac.

La montagne, très rarement un espace public

C’est le cas du Parc naturel régional du Vercors, selon des modalités explicitées par Alan Fraschini : « Nous demandons à ce que les gens montent leur tente à partir de 17 h et la démontent au plus tard à 9 h le matin. Nous nous sommes alignés sur des horaires d’hiver », expose l’écogarde. Cette réglementation varie selon les massifs. Dans les Écrins, par exemple, il n’est possible d’installer son campement qu’à partir de 19 h, et à plus d’une heure de marche des routes.

Pourquoi ces restrictions ? « Quand on va en montagne, on a une sensation de liberté, mais il faut savoir qu’on est toujours chez quelqu’un », explique Alan Fraschini, « On peut être chez un propriétaire privé, sur des terrains qui appartiennent à la commune ou au département. Et on ne le sait pas forcément. »

Comment faire la différence ?

« De la même manière que quand on va en mer, il y a des choses à savoir. Il faut se préparer, se renseigner. », souligne l’écogarde. Certains espaces naturels sensibles, comme des zones humides, peuvent ainsi être interdits malgré des abords accueillants.

« Si on a un doute sur la nature de l’endroit où on se trouve et qu’on ne peut pas demander l’autorisation, il y a quelques règles à connaitre », poursuit Alan Fraschini. « Par exemple, on évitera de mettre sa tente dans un pré qui n’a pas été fauché, on risquerait de coucher toute l’herbe, qui deviendra inexploitable pour faire le foin. » Dans ce cas, il conseille d’installer sa tente en lisière d’un champ.

« Pour que ça fonctionne, il faut de petites réglementations »

Dans le Vercors, le Parc naturel régional a choisi de privilégier la piste de la médiation à celle de la restriction devant les problèmes que peuvent poser les adeptes du bivouac. « Certaines personnes n’ont pas forcément les codes, ils n’ont pas l’habitude de venir en montagne », concède l’écogarde. « L’idée, c’est de les sensibiliser. Après, c’est une question de respect mutuel : pour que ça fonctionne, il faut de petites réglementations. »

Il rappelle notamment l’obligation de ne pas laisser traîner de déchets et de ne pas faire de feu, « même si je sais bien que ça a un côté sympa », admet-il. La cause ? Une destruction durable de la microfaune et de la flore locale sur plusieurs centaines d’années. « La preuve, on arrive à retrouver des vestiges de feux préhistoriques lors de fouilles. »

Les flammes, en montagne, il faut les préférer dans le ciel, au coucher du soleil. Pour continuer à pouvoir les observer librement depuis la bordure de sa tente, mieux vaut donc se renseigner à l’avance pour savoir si l’on a le droit ou non de planter ses piquets. Et respecter les autres en le faisant.

Quelle réglementation dans les Parcs nationaux de nos départements ?

Écrins

Bivouac autorisé de 19 h à 9 h, à plus d’1 h de marche des accès routiers et des limites du cœur du parc. Dans les zones du pré de la Chaumette, des lacs de la Muzelle et à côté du lac du Lauvitel, le bivouac doit s’effectuer dans les zones prévues pour cela. Sur les plateaux d’Emparis et du Taillefer, mieux vaut surveiller la présence d’arrêtés municipaux.

Vanoise

Bivouac autorisé uniquement aux abords des refuges, interdit sous peine d’amende ailleurs. Accès payant. Nécessité de réserver auprès des gardiens de refuges. Accès à certaines commodités des refuges (sanitaires, salle hors-sac, …).

Et dans les Parcs naturels régionaux ?

Bauges

Sur 85 % de la zone, bivouac toléré en cas d’accord du propriétaire ou de l’exploitant du terrain. Sur la commune de Les Déserts et les alpages du Semnoz, bivouac autorisé uniquement dans les sites dédiés. Dans les communes de La Thuile et la Réserve nationale de chasse et de faune sauvage (RNCFS) des Bauges, bivouac strictement interdit.

Chartreuse

Bivouac toléré en-dehors des mois de juillet et d’août sous condition de l’accord du propriétaire éventuel ou du berger s’il y en a un. Interdiction de bivouaquer sous tente en juillet et août.

Vercors

Bivouac autorisé entre 17 h et 9 h du matin.

Queyras

Bivouac interdit dans le vallon de Bouchouse, sur la commune de Ristolas, à l’intérieur du périmètre de protection du biotope. Plusieurs communes ont pris des arrêtés municipaux interdisant le bivouac à moins d’une heure de marche du village et de ses hameaux. Il est toléré de 18 h à 9 h ailleurs.

Baronnies provençales

Le bivouac n’est pas réglementé par le Parc naturel régional, qui indique qu’il faut se référer aux arrêtés municipaux des communes concernées. Sans interdiction, il est possible de bivouaquer dans le respect de la législation en vigueur et en cas d’approbation du propriétaire éventuel.

Mont-Ventoux

Le bivouac est interdit du 15 juin au 15 septembre, sauf éventuellement s’il est accompagné par un professionnel. Il est toléré le reste de l’année en-dehors de certaines zones réglementées par un arrêté préfectoral de protection biotope ou dans les réserves biologiques intégrales.

Verdon

Bivouac autorisé entre 19 h et 9 h à plus d’une heure de marche à l’intérieur des limites du parc ou du dernier accès automobile. Le bivouac en camping-car, caravane ou tente de toit est interdit.

Luberon

Bivouac interdit sur l’ensemble des massifs en période de risque de feux de forêt, du 1er juillet au 15 septembre. Il peut être toléré le reste de l’année en cas de respect des conditions classiques.

Article issu du Dauphiné Libéré

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