Le loup n’est plus « strictement protégé » en Europe : que change la nouvelle directive ?

Le loup n’est plus une espèce “strictement protégée” en Europe. L’animal est désormais “protégé”, après la modification de la directive “Habitats” par le Conseil de l’Union européenne, le 5 juin, qui aligne ce texte sur la convention de Berne, elle-même modifiée en ce sens en décembre 2024. Les États membres peuvent maintenant modifier leur gestion des populations de loups – ou décider qu’ils restent une espèce “strictement protégée”.

« Il était temps ! Chez nous, la pression devient insupportable dans certains endroits », souffle Anne-Marie Gros, coprésidente de la FDSEA 05, qui affirme « qu’il y a plus d’attaques, qui sont plus meurtrières ». Le déclassement n’est pour elle que « le début d’un long travail ». Attention, « ce n’est pas pour ça qu’on va demander l’éradication du loup ; nous les agriculteurs ne sommes pas des barbares ».

« Il y a beaucoup plus de loups qu’on ne veut nous le faire croire »

Il s’agit cependant d’obtenir « plus de lisibilité » dans la gestion du canidé. L’éleveuse est persuadée que le nombre de loups annoncé par les services de l’État « n’est pas l’exacte vérité ». « Je n’incrimine pas l’OFB [qui assure les comptages, NDLR], mais je pense qu’il y a beaucoup plus de loups qu’on ne veut nous le faire croire. » Sa crainte ultime : « qu’on le déclasse d’un côté, mais qu’on le sanctuarise dans les Alpes ». « Il ne faut pas qu’il y ait plus de prélèvements ailleurs, et moins ici. Il faut les mêmes prélèvements partout, pas qu’on sacrifie notre agriculture de montagne ! »

Même satisfaction teintée de méfiance à la Confédération paysanne. « Le déclassement va dans un bon sens mais ce n’est pas du tout sûr que les services de l’État vont changer radicalement leur façon de fonctionner. On attend de voir et on réitère nos revendications : ce qu’on veut, ce sont des moyens de protection pour les troupeaux », résume Thomas Raso, porte-parole du syndicat dans les Hautes-Alpes. Ce qu’il trouve aberrant, c’est qu’il y ait « beaucoup de loups qui ne sont pas abattus en situation d’attaque. Cette histoire de quota, on n’en a rien à faire. Mais s’il attaque le troupeau , il faut pouvoir faire des tirs de défense ».

Photo Adobe Stock
Photo Adobe Stock

« Rien de ne prouve que les tirs soient réellement efficaces »

Régler les problèmes avec un fusil, « ce n’est pas bon signe », soupire Catherine Bouteron, qui représente dans les Alpes du Sud Ferus, association de défense des grands prédateurs. « On n’est pas contre sur certains alpages, quand c’est quasi nécessaire de tuer un loup parce qu’il y a trop de ravages. Mais c’est vraiment des cas qui doivent être exceptionnels. » Car « scientifiquement, rien de ne prouve que les tirs soient réellement efficaces. Ils augmentent d’année en année et ça ne règle pas grand-chose », argumente la Haut-Alpine.

Qui déplore que l’État n’encourage pas plutôt les solutions qui marchent. Comme le dispositif Pastoraloup mis en place par Ferus (aide aux bergers par des bénévoles). Ou tout simplement les mesures de protection des troupeaux. « Dans le 05, il n’y a pas eu plus de victimes en ce début d’année que l’an dernier ; par contre il y a eu pas mal d’attaques. Ça veut dire que la protection fonctionne : les éleveurs savent de mieux en mieux s’en servir, dans les territoires historiques de présence du loup. »

Le déclassement du loup fait craindre à ses défenseurs une explosion du braconnage. « Est-ce que ça ne va pas l’encourager ? » s’inquiète Catherine Bouteron. « On laisse entendre que le loup, ça peut devenir une espèce chassable et que ce n’est pas très répréhensible d’en tuer un. Il va falloir être vigilant. » La Coordination rurale “demeure prudente” après le déclassement du loup. Pour sa déclinaison dans le droit français, le syndicat exige notamment “des actions préventives et durables pour écarter les prédateurs des zones d’élevage plein air”, “le soutien aux lieutenants de louveterie” et “une méthode de comptage transparente et fiable”.

Article issu du Dauphiné Libéré

Découvrez nos lectures liées
Restez informé, suivez le meilleur de la montagne sur vos réseaux sociaux
Réserver vos séjours :
hébergements, cours de ski, forfaits, matériel...

Dernières actus