Les Américains et leurs forfaits internationaux veulent conquérir l’Europe

À Verbier, on parle encore de rumeur. Certains commerçants ou gérants d’école de ski ne veulent trop y croire. Pourtant, une lettre anonyme en date du 20 janvier et déposée dans les boîtes aux lettres des riches propriétaires de chalets a semé le doute. Le texte faisait état de tractations entre la société américaine Vail Resorts et l’actionnaire principal, l’Alsacien Christian Burrus, présent dans les assurances, issu d’une famille franco-suisse au long passé entrepreneurial, qui détient 30 % de Téléverbier. Selon les médias suisses (Le Matin Dimanche et la RTS), le courrier appelle les propriétaires locaux à s’y opposer, en se mobilisant pour lever 150 millions de francs suisses (150 M€) et participer à un éventuel rachat.

Si le propriétaire a démenti, de sources proches de Vail Resorts, on évoque des négociations pour une offre qui pourrait atteindre jusqu’à cinq fois le cours en bourse de l’action Téléverbier, seul opérateur du canton du Valais à être coté. Reste que la commune de Val de Bagnes qui détient un quart du capital (repris notamment en 2009 à la Compagnie des Alpes) aurait son mot à dire, ainsi que d’autres porteurs minoritaires.

Une compagnie mastodonte

Vail Resorts n’est autre que le premier groupe d’exploitants de domaines skiables au monde. Un chiffre d’affaires de plus de 2,8 milliards de dollars, plus du double de la Compagnie des Alpes, numéro 1 européen avec ses dix sites en France. Et 41 stations dans son escarcelle, entre États-Unis (Vail, Park City, Beaver Creek), Canada (Whistler), Australie, où il a repris trois domaines sur la vingtaine que compte le pays, et Suisse. Après Andermatt en 2022, l’Américain a racheté Crans Montana, non loin de là, en fin d’année dernière. Surtout le géant du Colorado a développé une sacrée force de frappe à travers un forfait annuel à près de 900 €, l’Epic Pass permettant à l’abonné de skier sur quatre continents : dans les domaines du groupe, mais aussi une vingtaine d’autres partenaires, dont des stations japonaises, Courchevel en France et… Verbier.

L’Europe dans le viseur des méga-compagnies d’exploitation

Son rival le groupe Alterra, numéro deux mondial a développé le Ikon Pass (Aspen, Mammoth, Jackson Hole…) un poil plus cher (1300 €) qui permet de skier à Chamonix et dans d’autres stations européennes (Kitzbühel, Dolomites, Zermatt…). Lui aussi basé au Colorado (Denver), cet acteur majeur aurait également des ambitions d’implantation en Europe.

Justement ce qui peut effrayer les résidents de Verbier, c’est de voir appliquer cette politique tarifaire qui consiste à faire payer très cher le forfait journée (Plus de 200€ dans certaines stations américaines à Noël) pour inciter le skieur à souscrire un abonnement assurant à l’opérateur une sacrée trésorerie avant même la saison et déconnectant les revenus de l’aléa climatique. Autre spectre : que la station perde son âme, si d’aventure Vail Resorts venait à reproduire son modèle intégré, faisant main basse sur les restaurants, magasins, écoles de ski. « J’en doute, vu notre organisation plutôt horizontale, avec une multitude d’acteurs » estime un directeur d’école de ski de Verbier.

Parviendront-ils à s’installer en France ?

En décembre, dans une interview à la RTS le représentant de Vail Resorts à Crans Montana évoquait une « stratégie d’expansion en Europe transparente ». Selon un bon connaisseur des remontées mécaniques suisses « Verbier est la seule station véritablement rentable dans le canton du Valais, à part Zermatt mais qui restera toujours indépendante. Au travers de son Epic Pass, Vail Resorts cherche à se développer en Europe et on a vu à Crans Montana que ce groupe a un véritable trésor de guerre pour des acquisitions ». Pour Laurent Vanat, expert de l’économie du ski, la Suisse constitue pour Vail la porte d’entrée du marché européen. « Aux États-Unis, ils n’ont plus grand-chose à mettre dans leur escarcelle, ils prospectent ailleurs. En Europe ils ont eu quand même beaucoup de peine à rentrer. »

 

Va-t-on vers une mondialisation du ski ? « Trois quarts du marché échappent aux groupes internationaux, et restent à la main des stations individuelles », nuance Laurent Vanat. Après le Magic Pass qui fédère une trentaine de stations suisses de taille moyenne, le modèle des forfaits multistations pourrait-il gagner un jour la France ? En tout cas selon certains observateurs, il n’est pas exclu que Vail ou Alterra poussent les portes de nos massifs. Même si le modèle des délégations de service public, propre à notre pays, pourrait constituer un obstacle à leur politique tarifaire prohibitive pour le ski à la journée.

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