Les pentes du Margériaz victimes de leur succès, au point de devoir appeler les gendarmes à 22 h 30. C’est la situation inédite qui s’est déroulée le 14 janvier dernier, à la station de sports d’hiver des Aillons 1 400 dans le massif des Bauges, où une trentaine de personnes au moins est venue se garer au pied des pistes afin de profiter d’une nuit de quasi pleine lune. « Je n’étais pas du tout au courant de l’ampleur de la fréquentation nocturne aux Aillons 1 400 », reconnaît Valeria Minuzzo directrice depuis six semaines de la SEM des Bauges, la société exploitante du domaine skiable des Aillons-Margériaz.
« On ne veut pas avoir de décès sur notre domaine »
« Ils grimpent le long des pistes, mangent en haut du domaine à 1 845 mètres d’altitude et profitent des pistes de descente, sans prendre en considération les dameuses », s’indigne la patronne du domaine skiable. Les dameurs n’ont d’ailleurs pas pu terminer leur service ce mardi, par peur de tuer un skieur. Dépêchés sur place, les gendarmes ont relevé l’ensemble des plaques d’immatriculation des véhicules garés aux Aillons 1 400 et ont procédé à de la sensibilisation des skieurs de randonnée en train de s’équiper sur le parking.
« Sur notre domaine skiable il y a des endroits où il faut utiliser le treuil pour damer, avec un câble qu’on ne voit pas, rappelle Valeria Minuzzo. Ce dernier peut se tendre d’un coup, balayer la piste avec un phénomène élastique qui peut causer des blessures voire la mort. Nous, on ne veut pas avoir de décès sur notre domaine. »
« Le travail des dameurs est saccagé »
Et outre les risques bien réels de blessures, c’est aussi la qualité du damage qui s’en trouve dégradée le lendemain matin avec cette pratique sportive totalement interdite la nuit sur nos domaines skiables. « D’une piste damée le soir qui est propre comme un billard on se retrouve le lendemain matin avec des grosses traces de carre en plein milieu, explique Sevan Lacks patrouilleur aux Aillons-Margériaz. Le travail des dameurs est saccagé. »
Prise au dépourvu le 14 janvier dernier par l’afflux de skieurs de randonnée, la direction des Aillons-Margériaz a décidé de réagir en assurant désormais une présence continue d’un membre du personnel le soir, entre 19 et 22 heures. « C’est pour faire de la pédagogie et de la prévention, défend Valeria Minuzzo. Nous n’avons pas de pouvoir de police. Nous pouvons informer, mais nous ne pouvons pas les bloquer et les empêcher d’y aller. »
« Le ski de randonnée les nuits de pleine lune c’est trop beau ! »
Un travail de pédagogie que la directrice de la SEM a dû exercer dès le lendemain, aux alentours de 20 heures, lorsqu’un groupe de six personnes est venu se garer au pied des pistes. Dans le minivan, Alicia, avec cinq amis. « Le ski de randonnée les nuits de pleine lune c’est trop beau !, confie-t-elle avec son accent espagnol. On n’a pas besoin de lampe frontale, on voit comme en plein jour tout en admirant les étoiles. » Cette dernière fait défiler sur son smartphone une dizaine de photos prises ce lundi toutes plus splendides les unes que les autres. On comprend d’autant mieux l’attrait du Margériaz pour ce groupe d’amis, entre 30 et 40 ans, venus de Saint-Alban-Leysse après leur journée de travail.
Des échanges tendus
Mais c’était sans compter avec la directrice de la SEM des Bauges, qui fondit droit sur eux :
– « C’est interdit de monter ou de descendre sur les pistes la nuit, vous risquez une amende de 150 euros par personne, c’est très dangereux avec les dameuses », annonce Valeria Minuzzo.
– « Qu’est-ce qui vous prouve qu’on utilise les pistes ?, lui répond l’un des participants. On peut redescendre par la forêt ou en hors-piste. »
– « Je suis la directrice de la SEM. Je ne peux pas vous empêcher d’y aller, donc je vais prendre en photo votre plaque d’immatriculation et je vais porter plainte à la gendarmerie. »
– « Si vous nous prenez en photo sur les pistes vous aurez une preuve. Mais si vous prenez en photo notre véhicule vous aurez une preuve que nous sommes garés sur un parking. »
– « Malheureusement, je dois mettre tout en œuvre pour vous interdire de monter sur le domaine. Donc j’attendrai que vous montiez pour appeler les gendarmes. »
L’échange, tendu, s’achève par un conciliabule entre les six skieurs. Une moitié semble favorable à y aller quand même, tandis que l’autre penche pour rebrousser chemin. Ces derniers finissent finalement par quitter, à regret, les lieux. Ces derniers souhaitent connaître les horaires des dameuses, pour pouvoir revenir quand elles ne seront plus en train de travailler sur le domaine. Ils assurent n’avoir jamais été mis au courant que leur activité était interdite sur le domaine skiable.
Article issu du Dauphiné Libéré