Pendant 20 ans la veste Cardis fut la reine du vêtement outdoor

Sa veste lui a permis de vivre la vie d’aventurier et d’explorateur dont il avait toujours rêvé. En 1971, Philippe Cardis est aspirant guide et s’apprête à aller en Afghanistan pour une expédition sur des cimes quasi inconnues. Pour ses futures ascensions, il part en quête d’une veste imperméable, chaude et confortable, mais qui laisse la transpiration s’évacuer. « À l’époque, pour un grand gaillard comme moi, on ne trouvait que des coupe-vent ou des vestes en duvet qui vous arrivaient au nombril. Et puis, aucun d’eux n’était à la fois imperméable et résistant », se souvient l’inventeur chamoniard. Faute d’avoir l’équipement idéal, ce bricoleur ingénieux décide de la fabriquer lui-même et réalise un prototype avec l’aide de sa mère, couturière chez Nina Ricci avant son mariage.

Un premier modèle fait-maison

Après avoir confectionné sur la table de la salle à manger ce premier modèle, le jeune homme de 20 ans teste son concept. Sur les contreforts de la vallée du Wakhan, cette innovation “deux en un” dépasse ses espérances. « Elle était simple, fonctionnelle, très résistante et plutôt esthétique. Taillée façon kimono, elle offrait en plus de la liberté de mouvement au niveau des épaules et des manches », résume celui dont le nom est entré dans le langage courant. « J’ai très vite compris que sa grande force, c’était sa polyvalence ».

Ingénieux, efficace…

En vérité, le succès de la Cardis repose surtout dans l’utilisation d’un matériau inédit. Dans la doublure de sa veste se cache l’écran Somflex. Un film de polyéthylène et d’aluminium, perforé et ouatiné, utilisé pour l’isolation des toitures de maison. Bref, la fibre révolutionnaire qui permet à la veste d’être chaude et respirante sans pour autant être épaisse.

Après ces prototypes artisanaux, le jeune Cardis cherche à industrialiser la fabrication de sa veste et démarche plusieurs entreprises françaises. Il se rapproche de l’équipementier Francital qui réalise les premiers modèles en 1972. Le succès est immédiat. Adoptée autant par les professionnels de la montagne que par les alpinistes amateurs, la veste apparaît vite comme un indispensable pour tous les sports d’extérieur. Marins, motards et même chasseurs se l’approprient et réclament de nouveaux coloris.

…Et esthétique !

À la fin des années 70, ce vêtement technique devient même un accessoire de mode. Dans les grandes villes, cet anorak seyant s’invite dans tous les dressings des bobos voulant se la jouer “casual clothes”. Des pubs gigantesques ornent les murs du métro parisien. Les personnalités de l’époque sont mêmes photographiées avec leur exemplaire dans les grands magazines, comme en témoignent les coupures de presse compilées par l’inventeur dans un classeur. Le président de la République Valéry Giscard d’Estaing apparaît ainsi profilé dans sa Cardis à la Une de Jour de France , lors de ses vacances aux sports d’hiver. Le réalisateur Patrice Leconte fait la couverture de Première dans sa veste d’aventurier à l’occasion du tournage des “Spécialistes”.

Disruptive, cette veste permet à Philippe Cardis de se tenir au courant des projets d’exploration de la communauté montagnarde. « J’équipais les grands alpinistes puisqu’ils contribuaient au rayonnement de la veste, et parfois, je me suis invité dans leurs bagages », s’amuse le créateur, qui embarque en 1979 sur les traces de l’explorateur Shackleton à bord d’un voilier où figurent une dizaine de guides et de skippeurs. Premier navigateur et alpiniste à s’aventurer dans les mers les plus australes, le Chamoniard jouit alors d’une certaine notoriété.

L’âge d’or de la « Cardis », début et fin

Une marque de chaussures en fait l’égérie de sa gamme outdoor, aux côtés du footballeur Maxime Bossis ou des gymtoniqueuses Véronique et Davina. En 1975, son gabarit lui vaut l’honneur de doubler Sean Connery pour le film “L’Homme qui voulut être roi”, tourné en partie à Chamonix.

La Cardis dépasse le million d’exemplaires vendus et inspire tous les fabricants de sportswear. Première veste technique de sa génération, elle est d’ailleurs copiée par tous les fabricants de vêtements de sport dès son lancement. L’entrepreneur cherche ensuite à équiper des pieds à la tête les montagnards. Gants et pantalons rejoignent une grande partie des magasins de sport d’Europe qui s’arrachent le vêtement développé au pied du mont Blanc. Mais la veste multisport reste de loin l’article le plus courtisé. Elle règne sans partage ou presque sur le marché, jusqu’au jour où la concurrence internationale entraîne la délocalisation d’une centaine de milliers d’emplois textiles dans le nord de la France. Une crise sectorielle que regrette encore le septuagénaire, déçu d’avoir vu un savoir-faire et une industrie quitter brutalement l’Hexagone.

L’arrivée des membranes de type Gore-Tex sonne la fin de l’ère Cardis. Ce dernier laisse à d’autres le soin d’essayer de relancer sa veste, 20 ans après. La tentative échoue quelque peu, preuve que la réussite de cet habit technique reposait beaucoup sur la débrouillardise de son concepteur. 50 ans après la sortie de ses premiers modèles, le retraité qui va encore cueillir de temps à autre des cristaux dans le massif du Mont-Blanc porte toujours quelques-unes de ses vestes, lorsque l’hiver s’invite. Et difficile d’y voir la moindre trace d’usure ! Une durabilité dans le temps qui rendrait presque nostalgique.

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